26 avril
On l'attendait avec impatience, on craignait les légendaires nappes de brumes qui l'entourent, mais ce matin là, le soleil était radieux pour notre excursion à la Grande Muraille !
Nous partons très tôt pour ne pas avoir à la parcourir au pas de course. Nous trouvons facilement un minibus qui peut nous déposer en cours de route non loin de la muraille. Nous connaissons les prix et ce n'est pas du tout celui qu'on nous annonce.
Je soupire : ah non, c'est pas vrai, on se croirait au Vietnam ! L'heure matinale ajoute à mon exaspération. Heureusement, Charly garde son sourire et parvient à bien négocier.
Nous réussissons à sauter au bon endroit, c'est-à-dire à Jing Shan Ling, le point d'entrée de la Muraille le plus éloigné de Pékin. En effet, il en existe de plus proches, mais ils sont bondés et outrageusement restaurés. Celui que nous avons choisi est le plus sauvage et surtout le point de départ d'une randonnée sur la muraille jusqu'à un autre point d'entrée : Simataï.
Un paysan du coin fait taxi avec sa voiture et nous emmène jusqu'au guichet d'entrée, à quelques kilomètres de la route principale. Nous savons déjà que notre projet de randonnée est synonyme de racket: il faudra payer trois fois pour la même muraille: un billet d'entrée tout de suite, le droit de passage sur un pont suspendu, et encore un autre ticket car Simataï, à la fin de la randonnée, se situe dans une autre province ! Le Routard s'insurge contre ses pratiques, nous sommes prévenus et décidons que rien n'entamera notre bonne humeur, pas même la rapacité des Chinois.
Nous commençons à gravir une colline. Pour l'instant, la Grande Muraille est encore invisible. Après une rude montée, nous nous retrouvons dans une tour de garde et c'est l'émerveillement. J'avais peur d'être déçue, mais non, c'est incroyable. On peut suivre le "serpent de pierre" à perte de vue sur les crêtes des collines. Je bondis de joie. Je réalise pleinement que je suis en Chine, ce pays qui voulait dire "très très loin, à l'autre bout du monde" quand j'étais petite. Ce qui me paraissait inaccessible est devenu réalité. Je me rêvais globe-trotteuse et j'y suis. Pour de vrai! Cette "révélation" me remplit de bonheur pour la journée.
Nous commençons alors notre merveilleuse balade sur la muraille. Dès que l'on s'éloigne du point d'entrée, nous sommes absolument seuls. De tour de garde en tour de garde, nous dominons des collines arides et escarpées. La muraille monte et descend pour suivre la crête et la pente est parfois extrêmement raide. Nous faisons des petites haltes pique-nique sur le toît des tours de gardes, c'est un vrai plaisir.
Selon les endroits la muraille est en plus ou moins bon état, il faut vraiment faire attention où on met les pieds! Certaines tours de gardes ont été parfaitement restaurées, d'autres tombent en ruine. Nous marchons d'un bon pas, nous prenant pour de courageux soldats montant la garde contre les envahisseurs de Nord. Les gardes de la tour étaient vraiment au milieu de nulle part, je pense au livre de Buzzati, "Le désert des Tartares".
Une absurdité ironique se dégage de cette portion de la muraille, érigée sur la crête de montagnes de toutes façons infranchissables par la moindre armée (même les chèvres auraient du mal à passer par là).
Régulièrement des vendeurs d'eau fraîche surgissent de nulle part, comme des diablotins jaillissant de leur boîte. Ils représentent une tentation épouvantable, car il fait vraiment chaud, et nous sommes en nage ! Heureusement nous avons de quoi faire un pique-nique.
A un moment, nous débouchons sur un tournage, sûrement d'un des nombreux clips de pop chinoise où figure ce symbole national. Nous attendons l'autorisation de passer puis arrivons au but de notre promenade (après avoir repayé): Simataï. Nous ne sommes plus vraiment seuls mais la muraille est ici encore plus raide qu'ailleurs. C'est très impressionnant pour nos yeux et un peu dur pour nos jambes!
Après toutes ces heures à crapahuter sur la muraille, il faut maintenant rentrer à Pékin. Le prochain bus part du parking dans 2 heures. Nous n'avons pas envie d'attendre. Nous décidons, un peu inconsciemment, de partir à la recherche de la mystérieuse gare routière mentionnée par le Routard. Peut-être que des bus en partiront plus régulièrement.
Nous rencontrons un jeune Belge venu en Chine perfectionner son kung-fu et l'embarquons dans cette expédition aventureuse. Au bout d'une demi-heure de marche sur une route qui serpente, nous concluons que la gare routière dont parlait le Routard devait en fait être le parking... Nous ne laissons pas abattre et nous disons qu'au pire on attrapera au vol le bus de 17h, celui que nous n'avons pas voulu attendre.
De gros camions s'arrêtent prêts de nous, visiblement étonnés de voir des touristes marcher le long de la route. Certains chauffeurs sont même prêts à nous emmener au croisement avec la route de Pékin, mais ils n'ont pas de place pour trois. Ce qui est moins drôle c'est qu'un bus passe devant nous et ne s'arrête pas à nos signes... Notre plan d'attraper le bus de 5h pourrait bien tomber à l'eau. Nous sentons une certaine panique chez le Belge, qui commence vraissemblablement à regretter de nous avoir suivis.
Deux bus nous snobent mais un troisième finit heureusement par s'arrêter. Apparamment un bus local : zéro touristes en provenance de la Muraille dedans. Nous demandons d'un air inquiet à notre voisine s'il va dans la bonne direction, elle nous répond, en anglais, qu'il faudra juste faire un changement à la première gare routière.
Le trajet est long. Nous sommes étourdis par le soleil et notre longue marche, mais ravis de notre journée !
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