Autant notre première arrivée sur territoire chinois, deux semaines plus tôt, s'était plutôt bien déroulée, malgré des problèmes de taille (nous n'avions pas de téléphone et il fallait joindre Silvia, etc), autant notre seconde arrivée en Chine était plutôt... bizarre.
En raison des changements et surprises des compagnies de bateaux, nous avions, comme je vous l'avais raconté, pris un bateau de Shimonoseki, obscur port japonais, vers Qingdao, grande ville chinoise assez peu connue. Qingdao étant grosso modo située entre Shanghai et Pékin, notre but était de rejoindre cette première le plus vite possible, car c'est originellement là que nous voulions aller.
En débarquant du bateau, il nous fallut donc nous précipiter vers la gare routière de la ville. Nous rencontrons sur le chemin un paquet de gens qui veulent absolument nous loger dans leur hôtel, et qui nous poursuivent avec des photos de chambres. Nous refusons poliment, mais leur demandons le chemin.
Demander son chemin : à éviter en Chine dans les endroits passants. Car, la curiosité des Chinois aidant, vous risquez vite de vous retrouver entouré d'une marée humaine, chacun discutant de la question, des pours, des contres, des pourquoi (en chinois). Nous rions beaucoup de l'attroupement, mais sommes un peu gênés aussi de toute cette attention. Une femme nous suivra jusqu'à la gare routière, en nous parlant en chinois, et en répétant "Shanghai, Beijing" en continu. Nous ne saurons jamais si elle voulait nous aider ou nous vendre un truc. Nous sommes un peu décoiffés par la brutalité des moeurs chinoises, que la douceur des japonaises nous avait fait un peu oublier.
Rebelotte à la gare routière, on nous saute dessus dans tous les coins, tout ça sent l'arnaque, mais au guichet, c'est le même prix qu'on nous annonce. Le bus-couchette part immédiatement, nous n'aurons pas le temps de boire une fameuse bière de la ville.
Une bière de la ville ? Fameuse ?
Eh oui en chinois Qingdao se prononce plus au moins Tsingtao, comme la bière qu'on trouve dans tous les restaurants chinois et japonais de France. Qingdao était en effet un ancien comptoir allemand : la ville conserve paraît-il beaucoup de son héritage architectural allemand, mais garde aussi de cette époque une brasserie qui est devenue une réussite économique.
Pourquoi tant de haine ?
Le bus est un des pires que nous avons pris en Chine : odeur pestilentielle, inconfort, et toujours les inénarrables films à la noix qui passent sur la télé (cette fois-ci c'est un film de cape et d'épée chinois, mortellement ennuyeux). Ce qui est horrible, c'est que nous sommes censés avoir un voyage long de 18h, et que nous ne savons pas comment nous allons tenir tout ce temps, allongés sur ces couchettes. Par chance cependant, le coucher de soleil au moment où nous montons dans le bus est magnifique, et nous sommes allongés côte à côte. Aglaé craque un peu car sa migraine persiste.
Moins drôle, nous sommes obligés de survivre sur les biscuits qu'il nous reste du voyage en bateau, car nous n'avons déjà plus de yuans (monnaie chinoise) : nous voulions attendre les HSBC de Shanghai pour retirer de l'argent, et pensions pouvoir tenir avec les billets qu'il nous restait de notre précédent passage en Chine. Or le bus coûtant deux fois plus que prévu, il ne nous reste vraiment pas grand-chose !
A un arrêt nocturne, où nous pourrons nous soulager dans des toilettes tellement sales que les hommes y urinent depuis l'extérieur (porte ouverte, pour ne pas avoir à rentrer), nous rassemblons nos derniers yuans pour nous acheter le seul truc passable en vente (c'est-à-dire qui n'est pas de l'immonde viande séchée aromatisée), à savoir des biscuits ruisselants d'huile cancérigène.
Erreur de calcul
Nous nous étions couchés en espérant dormir le plus longtemps possible pour éviter de supporter ce trajet. Nous sommes réveillés en sursaut, en pleine nuit. Le chauffeur et deux membres de l'équipage nous regardent en riant, et nous disent de descendre. Bien habitués à ce genre d'arnaque (typique en Inde, typique au Vietnam), qui consiste à faire descendre les gens par cruauté, ou plus souvent pour qu'ils prennent un taxi, nous refusons de descendre.
Ils ne parlent pas anglais, mais nous répètent qu'ici c'est Shanghai. Nous voyons bien un taxi passer (ce qui signifie a priori que nous sommes dans une grande ville), mais non, cette rue vide et minable et moche et sale, ça ne peut pas être la belle Shanghai étincelante ! Et pourquoi ne sommes-nous pas dans une gare routière ? Il y en a plusieurs à Shanghai !
Nous refusons de comprendre pendant longtemps, nous leur demandons de nous situer sur des plans de Shanghai, etc. Mais ils semblent tous s'entendre, passagers comme chauffeurs. Pourtant, ces sourires, qui s'avèreront être des sourires curieux et amusés, nous font croire qu'on se moque de nous. Nous finissons par descendre, interloqués aussi qu'ils ne se soient pas énervés ou emportés (alors que nous retardons leur trajet), récupérons nos bagages, et n'arrivons toujours pas à croire que nous sommes peut-être près de la gare de Shanghai. Le trajet a seulement duré 10h en 2009, au lieu de 18h en 2007!
Il est 5 heures du matin, et lorsque le jour commencera à venir, il n'apportera au départ que du gris. C'est le début d'une journée particulièrement nulle, peut-être la plus nulle du voyage.
Derniers plans, une invitation
Il y a 7 ans
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