vendredi 27 février 2009

Bangkok with Adeline

7-9 fevrier

Malgre 1h30 a attendre un bus qui n'existait pas, Adeline et moi parvenons a rentrer de l'aeroport et allons sauver de la famine le malheureux Charly qui nous attendait pour manger! Apres un petit restaurant de rue sympa, nous partons a l'assaut d'un minuscule marche de nuit. Charly et Adeline testent courageusement un dessert etrange: lait de soja chaud avec des especes de graines qui y flottent (du tapioca?) ; en petite forme, je me contente d'une demi-gorgee, et d'un shake a la fraise fraiche !

T'as pas 100 bahts?

Reveilles le lendemain par un choeur de miaulements, nous nous precipitons pour aller inaugurer notre nouvelle carte HSBC, arrivee tout droit de Singapour. Si vous vous souvenez bien, nous avions du faire opposition sur notre carte a Chennai, en Inde, mi-decembre. Apres un feuilleton a multiples rebondissements, l'energie conjointe des 2 interesses, de la maman de Charly, d'Adeline et de Julien (merci a tous!) a vaincu l'impardonnable manque de reaction et de professionalisme de cette banque maudite. Retirer des bahts avait donc un gout de victoire inesperee! Le baht est la monnaie la plus forte que nous ayons rencontree depuis le debut de se voyage: adieu les multiples zeros des kips et des riels!

New Bangkok

Dans le Skytrain (metro aerien), les larges avenues bondees et les buildings defilent. Les tours en verre ne sont pas concentrees dans un business district mais un peu dispersees dans la ville, ce qui donne des contrastes de hauteur saisissants. On voit encore de vieux immeubles cotoyer une tour dernier cri; ces derniers vestiges d'un passe revolu sont encore nombreux mais a l'evidence voues a disparaitre.


A notre arrive dans cette ville, c'est la Bangkok moderne et son enchevetrement de voies rapides que nous avons decouvert en premier. Ce spectacle nous a laisse une incroyable sensation de familiarite. Nous avons profondement ressentis a quel point toutes les grandes villes se ressemblent; nous avons eu exactement le meme sentiment, celui de retourner en terrain connu apres des mois de voyage.

Old Bangkok
Du Skytrain nous passons sans transition a une remontee du fleuve en bateau. Sur les rives, une autre ville defile: maisons d'un seul etage sur pilotis, baraques en bois croulantes construites litteralement sur le fleuve, ruelles etroites, mais aussi quelques vestiges d'un lointain passe colonial. Nous errons ensuite dans un incroyable marche aux amulettes, veritable paradis des superstitieux: on y trouve des mini-bouddhas roses fluos et des bijoux de portables porte-bonheur mais aussi de plus serieuses medailles pour proteger les conducteurs (genre St Christophe en version bouddhiste).

Nous visitons ensuite l'incroyable Palais royal de Bangkok : c'est une accumulation de temples, de pagodes, le tout scintillant de milles feux. Il y a des dragons dores, des guerriers multicolores, des creatures mi-hommes mi-oiseaux, des stupas recouvertes de fleurs en faiences, des temples en carreaux de salle de bain, des tuiles vertes, des Bouddhas en or, de belles fresques, des colonnes recouvertes de milliers de petits miroirs... C'est a la fois eblouissant et surcharge, d'une grande finesse et kitsch, et m'a laisse l'impression d'un dessert delicieux mais un peu ecoeurant. En parlant de dessert, le gigantisme du palais nous a amene tous les 3 au bord de l'hypoglycemie... heureusement que quelques batiments etaient fermes au public!

Tentative d'enlevement
Alors que nous dejeunions tranquillement dans un marche, une des serveuses du notre boui-boui est litteralement tombee amoureuse de Marius. Elle a passe tout notre repas a jouer avec lui d'un air extatique, et nous avons bien cru ne jamais le revoir. Heureusement, nous nous sommes montres extremement fermes avec la jeune donzelle et avons sauve Marius des ses griffes. (preuve que malgre le manque de photos de lui sur le blog, et de photos tout court, Marius va bien)

Malgre la chaleur ecrasante, nous voyons encore une foule devote, entouree d'un nuage d'encens et accrochant des foulards multicolores a une stupa, dans le Temple du Pilier de la Ville; puis un bouddha couche geant, tout dore sauf sous la plante des pieds (!).

Nous montrons ensuite a Adeline l'agitation folle de Khao San ou la musique est toujours aussi forte. Charly hesite devant des criquets grilles mais ne franchit pas le pas, nous nous contentons donc d'une bouffe de rue traditionnelle.

L'experience massage thai
Nous decidons de nous offrir un massage et choisissons une echoppe en plein air, au moins on est surs de ne pas tomber dans un truc louche! Sur le terrain d'une ancienne station-service transformee en restaurant, me voila a cote d'Adeline, toutes les deux dans une chaise longue a nous faire masser les pieds. En face, sur des tabourets, Charly se fait masser les epaules pendant que son voisin, tout rouge, a l'air de souffir le martyr quand sa masseuse l'attaque avec ses coudes. Mes pieds ont traine dans toutes les rues de Bangkok, je suis en tongs, je vous laisse imaginer la couleur et ma gene quand ma masseuse essaie le les faire changer de couleur avant de commencer son massage. A cote, Adeline est pliee de rire car elle est chatouilleuse. Les masseuses y vont fort et ca fait un peu mal, surtout quand elles vous passent un baton en bois sous les pieds! Charly ressort a moitie convaincu, par contre nous le sommes et esperons que ca aidera nos jambes a nous porter pour le lendemain!

Temple du bon gout versus temples de la consommation
Nous commencons la journee par des sucres rapides sous formes de donuts aux couleurs fluos dans le coeur de Bangkok: Siam Center. C'est un ensemble de grands Malls (centres commerciaux) modernes ou le tout Bangkok vient "se divertir" le week end. Avant d'aller y jeter un oeil, nous commencons par la maison de Jim Thompson. Nous ne savons pas trop de quoi il s'agit, mais tout le monde nous a dit d'y aller. Nous decouvrons alors un endroit mer-vei-lleux! Cet homme au gout incroyable a construit sa maison a partir de vieilles maisons traditionnelles thaies en tek. D'une grande sobriete, la maison et ses dependances sont sises dans un jardin luxuriant avec des bassins a nenuphars. Nous sommes guides a l'interieur par une charmante guide parlant francais.

La decoration est une sorte de best-of d'Asie du Sud Est. Chaque objet (vase, scultpure antique ou table) est une merveille en provenance de Birmanie, du Cambodge, de Chine ou du Vietnam. C'est a la fois sobre et luxueux, d'une harmonie parfaite. Nous sommes litterallement enchantes par le lieu! Notre guide nous offrira meme un origami en forme d'oiseau pour nous porter chance a notre depart (car nous au moins avons ecoute sa visite, contrairement aux autres Francais bruyants de notre petit groupe, qui essayaient de prendre des photos en cachette alors que c'etait interdit... grande classe!).

Nous passons ensuite au royaume de la consommation en traversant de grands malls. La clim est tellement froide qu'on s'attend a croiser des pingouins. Certains sont deserts et luxueux, d'autres ressemblent a des souks modernes et organises.

Eau, baguettes, sucre et fleurs
Nous empruntons ensuite un des bateaux/bus qui sillonent les petits canaux de la vieille ville. L'eau de ces canaux est nauseabonde et les maisons qui donnent dessus plutot bringuebalantes. Contrairement aux habituels canaux des villes europeenes bordes de restaurant chics, les canaux de Bangkok sont un peu les coulisses de la grande ville moderne, le revers que l'on voit peu. Rien a Bangkok ne donne sur l'eau de ces canaux, tout lui tourne le dos. De grandes baches en plastiques sont remontees sur les bords du bateau entre chaque arret pour que les passagers ne soient pas eclabousses par l'eau noiratre. L'experience est bien plus originale que le bateau-mouche de la veille !

Au cours de nos deambulations en direction de Chinatown, nous tombons sur un temple tout en haut d'une colline. Il est surmonte d'une enorme stupa doree et offre une tres belle vue sur la ville, qui s'etend a perte de vue. Dans l'enceinte du temple, nous cedons a la tentation de la superstition et faisons comme les Thais, en agitant un recipient rempli de baguettes numerotees. Il faut ramasser la premiere baguette qui tombe, regarder le numero et lire sur le papier correspondant les reponses a la question posee dans sa tete. Je ne divulguerai pas ici les reponses mysterieuses apportees par Bouddha... Nous remarquons une fois de plus le mercantilisme qui entoure le bouddhisme en Asie: guirlandes de billets de banque flottant au vent, vente de feuilles d'or a coller sur les statues de Bouddha... Difficile de voir le lien avec la pensee d'origine!

Nous revenons aux choses terrestres dans le sous-sol d'un mall ou de petites echoppes proposent tous les desserts imagninables. Chaque dessert semble avoir necessite 1kg de sucre et 1L de colorant. La palme revient a une espece de crepe recouverte d'une bouillie blanche et saupoudree de ce qui ressemble a des carottes rapees. En realite, ca a juste le gout de... sucre! Charly, intrepide, demande a gouter a tout.

Nous finissons notre promenade par le merveilleux marche aux fleurs. Au milieu des orchidees, nos jambes refusent de nous emmener plus loin. Nous rentrons alors en tuk-tuk. Le conducteur est heureusement ralenti par les embouteillages, car la veille, il s'agissait plutot d'un pilote de tuk tuk et ses pointes de vitesse avaient quelques peu effraye Adeline (qui n'a pas eu la chance d'etre intensivement entrainee en Inde).

Nous passerons la soiree a dicuter avec nos charmants hotes, Benjamin et Marie, revenus de leur week-end les poches pleines d'anecdotes.

mardi 24 février 2009

Bangkok 1er jour - contrer la lose en douceur

Nous étions tellement épuisés que nous avons dormi comme des loirs dans ce qui illustre le mieux le mot "bouge" depuis le début du voyage. Au lever je tente de dissiper les cauchemars de cafards jaillissant hors du livre de comptes, nous payons la souriante famille qui tient le bouge, et partons à l'assaut de la ville. La rue Khao San, si grouillante, si pétaradante, si protéiforme la nuit, n'a presque plus rien du monstre tonnant et hurlant qu'il était la veille. Il est difficile d'etre autant fasciné par cette atmosphère qui a tout de la gueule de bois du dimanche matin, mais il fait beau et cette gueule de bois-là a le sourire. La ville ressemble à un robot sans piles, aux yeux éteints qui laissent deviner la puissance qui les animait la veille.

Nous sautons dans un tuk-tuk pour rejoindre B. et M., qui nous logent le temps de notre séjour à Bangkok. Khao San est trop éloigné du métro aérien de Bangkok, qui ne dessert que les quartiers d'affaires, aussi nous prenons un petit véhicule jusqu'à la plus proche station de Skytrain. Nous sommes assez surpris de constater que les tuk-tuks d'ici circulent tous au gaz, ce qui fait qu'ils produisent un bruit proprement effarant, à mi-chemin entre la scie sauteuse et le réacteur d'avion (autant dire qu'on a l'impression d'aller un peu plus vite qu'en réalité). La circulation est ici à l'image du pays par rapport à sa région : plus propre, plus soft. Personne ne klaxonne, personne ne double n'importe comment, les règles de circulation sont respectées, il y a des feux rouges,bref : la civilisation.


Condos, piscines et chats fous

Nous arrivons devant le Siam Center, qui est le centre de Bangkok : trois immenses centres commerciaux plus ou moins chics, en plein milieu du coeur financier de la ville. Gigantesques gratte-ciels, autoroutes surélevées, énorme blocs de béton du Skytrain qui chapeautent le tout, plus les nombreuses passerelles pour piétons qui enjambent la route. Un reve d'architecte, ou plutot l'impression de voir les plans d'architecte tous propres, avec les faux passants qui déambulent dans les maquettes. D'autant que le Soleil, de la partie, donne au tout une coloration très optimiste, comme une métropole dont les aspects les plus lisses et les plus modernes seraient tout sauf inquiétants.

Le Skytrain, metro aerien de Bangkok, est certes tres inelegant de loin (on dirait une autoroute de beton qui passe au-dessus de la ville), mais une fois dedans le spectacle est fantastique : toute la ville et ses gratte-ciels nous sont offerts comme sur un plateau, il fait frais (nos sacs a dos commencaient a nous faire suer) et l'ambiance est detendue. La vue est inoubliable.

Arrivee a Phom Phrong, nom improbable et impossible a retenir de notre station. Quelques metres apres notre descente, nous trouvons la ruelle qui mene chez Benjamin, puis la Residence ou il habite (Tippy Court, rien que le nom). La, un gardien dont le sourire semble s'etirer jusqu'aux oreilles nous dit que pas de probleme, nous n'avons qu'a monter. Nous n'avons que le temps d'apercevoir que la classieuse residence comporte une piscine bleutee, et nous voila entres chez Benjamin et Marie.

Deux chats et deux sympathiques personnes nous accueillent. Les etres humains sont Benjamin et sa petite amie Marie, qui se reveleront adorables a chaque fois que nous les verrons. Mais nous les verrons peu, car des notre arrivee ils empoignent leurs sacs a dos et partent vers une reserve naturelle pres de Bangkok. Ils nous laissent donc en compagnie de leur deux chats sans noms, que nous sommes charges de nourrir. Et de surveiller.

J'insiste sur ce dernier point, car ces deux chatons, l'un noir, l'autre blanc tacheté, se révèleront les deux plus grandes terreurs que la félinité ait engendré. Durant nos trois jours sur place, ils n'auront de cesse de se poursuivre, de nous poursuivre, de se rouler dans nos sacs, de renverser les pots de fleurs, et autres betises dont la longue liste est à mon avis loin d'etre achevée. Et bien entendu, comme tous les chats du monde, et peut-etre encore plus en ce qui les concerne, ils sont tellement mignons qu'on leur pardonne tout.

Aeroport mon amour
Quant à l'appartement dans lequel ils vivent, il est tout simplement sublime, aérien, meublé avec gout, etc. Je me jette sur un canapé, leur ordinateur portable sur les genoux, et laisse Aglaé partir de l'appartement. Elle s'en va en effet pour aller chercher Adeline, notre compagnon de voyage pendant une semaine, dont l'avion ne va pas tarder à atterrir. Au lieu des 2 ou 3 petites heures que je m'appretais à passer seul, Aglaé ne reviendra avec Adeline qu'au bout... de 5 heures ! Mésaventures et attentes de bus s'étaient en effet enchainées sans arret, et lorsqu'elles rentrent elles me retrouvent presque incrusté dans le canapé.

La présence d'une nouvelle compagnon de voyage nécessite d'ouvrir un nouveau chapitre, non ? Allez, bonne nuit les petits !On se retrouve au prochain numéro.

Aeroport (message au present continu)

Un nouveau message d'Aglaé est apparu en dessous de celui-ci, n'oubliez pas de le lire!

Bonjour a tous !
Je vous ecris depuis l'aeroport de Singapour. Incroyable mais vrai, dans l'aeroport Changi - c'est son nom-, mieux meme, dans le BUDGET TERMINAL reserve aux pauvres qui prennent des low-cost, il y a une petite dizaine d'ordinateurs proposant un acces gratuit a Internet. Pour ceux qui ont deja eu l'occasion de constater les prix mirobolants des connexions internet a CDG ou Orly, ou meme Bangkok, c'est a peine croyab'.

L'occasion est donc saisie pour moi de vous donner des nouvelles fraiches de nous, dans la mesure ou le recit de notre blog a maintenant environ 19 jours de retard (la honte). Apres la Thailande qui fut reposante et paradisiaque a souhaits, nous avons passe 4 jours dans le centre commercial sans fin qu'on appelle Singapour, et c'etait fort drole. Aglae n'en finit pas de s'en remettre de sa tourista (c'est a dire qu'elle va mieux mais jamais tout a fait), j'ai encore de beaux coups de soleil de Thailande, et tous deux nous sommes bronzes comme Jean-Paul Belmondo.

Aglae a eu a peu pres trois celebrations de son anniversaire : sur une ile en Thailande autour d'un barracuda grille, au Raffles de Singapour le temps d'un mythique Singapour Sling, et en haut d'une tour de 70 etages qui donnait sur la ville de nuit. La chanceuse, me direz-vous.

Quant a Marius, il va bien, mais la faillite de notre appareil photo met en peril ses aventures photographiques, sans parler du manque de temps pour vous les poster...

Merci encore pour tous vos commentaires, qui nous font toujours plaisir et souvent rire.

Frontière = Galère

6 février

Chaque passage de frontière a jusque là été compliqué, que ça soit à cause d'un accident sur la route (Inde-Népal) ou de la malhonnêteté des agences de voyage (Laos-Cambodge)... Nous savons à quoi nous attendre! Mais comme nous sommes malades, nous ne voulons pas courir à la gare de bus locaux pour gagner 2$, et nous réservons donc 2 places de bus auprès de notre guesthouse: une fois n'est pas coutume! Nous prenons un bus uniquement jusqu'à la frontière, car le Lonely Planet explique qu'il est plus rapide et moins cher de prendre ensuite un bus thaïlandais de l'autre coté.

7h30: nous commençons par attendre 3/4 d'heure devant notre guesthouse pour échouer dans un minibus faisant le tour de toutes les pensions de Siem Reap. Nous sommes ensuite déposés près d'un grand bus qui est plein à ras-bords. Les autres touristes a l'intérieur sont déjà énervés par une longue attente. Il est 9h et nous ne voulons pas arriver à Bangkok au milieu de la nuit! Les mecs de la compagnie de bus, mous au possible, finissent par arriver à bourrer les sacs dans le couloir pour nous libérer 2 sièges... les plus pourris du bus : on a les jambes sous le menton et des sacs qui nous tombent dessus! ça commence bien!

9h30: Le bus finit par s'ébranler. Là, un insupportable mec chétif, toujours accompagné d'un gros mec à l'air complètement abruti, explique à l'assemblée que d'être serrés dans un bus pourri nous fait comprendre ce que c'est que d'être un pauvre cambodgien et que l'on pourra en parler dans nos pays en rentrant! Avec Charly, nous manquons de nous étouffer (de rire, de rage?) car les bus locaux longues distances sont tous spacieux et climatisés au Cambodge, comme nous avons pu le constater lors de l'agréable trajet Phnom Penh - Siem Reap. Nous commençons à regretter amèrement d'avoir failli à notre règle:
toujours éviter agences de voyage et guesthouses pour les transports. Pour la frontière lao c'était la seule solution, mais cette fois, nous aurions pu l'éviter!

10h30: Au bout d'une heure à peine de trajet, le bus s'arrête devant un stand complice de l'arnaque. Boissons et nourritures y sont 2 fois plus chères que d'habitude et les toilettes payants! Charly est le seul touriste qui pense à traverser la route et à aller acheter une bouteille d'eau au stand d'en face, au prix normal! Au bout d'une longue pause, le bus repart...

11h30: ...mais pour mieux s'arrêter, devant un restaurant, lui aussi reversant une commission au chauffeur bien entendu. C'est soit-disant l'heure de déjeuner et de toute façon ça ne sert à rien de protester : "Stop 40mn!". Le chétif s'exclame, toujours grande gueule "Cool man ! We are not machines!". La pause sera en fait d'1h15...

14h: arrivee a la frontiere, soit 3h30 d'attente inutile et 3h de vrai trajet! Nous sommes affamés, mais décidément le Cambodge ne nous réussit pas: avant la frontiere, dans un petit resto, la serveuse nous indique les prix des nouilles puis appelle son patron car elle ne parle pas bien anglais. Celui-ci nous annonce alors que pour nous, il double les prix! Nous nous levons, excédés: puisque c'est comme ça, nous nous achetons un paquet de gâteaux et nous précipitons vers la frontière.


Après la crise de l'appareil photo et l'incident du cafard bouilli, nous sommes ravis de quitter les cambodgiens. C'est vrai que les gens lambdas dans la rue ou les marches etaient souriants et sympathiques, mais les restaurateurs, commercants, guides et chauffeurs divers sont venus a bout de notre patience, certes emoliee par la fatigue et les microbes. Cependant, grace au gentil accueil de Davy, nous sommes surs qu'en restant longtemps dans le pays sans etre un touriste, les rencontres avec les cambodgiens n'ont rien a voir. Si vous voulez un apercu de ses aventures de prof de cine a Phnom Penh, voici le lien vers blog de Davy.


L'attente a la frontiere cambodgienne puis a la frontiere thailandaise est interminable : nous sommes au pic de la saison touristique en Asie du Sud-Est. Nous discutons avec un Francais, compagon de galere dans le bus sans fin. Comme tous les autres, il a pris un billet jusqu'a Bangkok, et nous nous disons qu'il n'est pas sorti de l'auberge...

Si nous avions su...

15h30: Nous entrons ENFIN en Thailande et, affames, nous jetons sur un plat de nouilles. Elles sont bonnes et peu cheres; de plus le chauffeur de tuk-tuk nous propose immediatement le prix indique dans le Lonely Planet pour nous conduire a la gare routiere: ouf! C'est de bon augure, nous reprenons vie!

16h00: Les choses se gatent a la gare routiere car tous les bus locaus sans clim, donc les moins chers, sont partis. Nous nous rabattons donc sur un bus climatise tres confortable qui file vers Bangkok. Nous esperons arriver a une heure decente pour trouver un hotel. En effet, nous avons appris la veille au soir que Benjamin, le fils de mes voisins de Thonon qui devait nous heberger, a un empechement pour le soir de notre arrivee.
Dans le bus est diffuse un spectacle thai absurde et grandiloquent avec des chanteurs kitschs, des travestis, des danseuses traditionnelles, du french cancan, du flamenco, des enfants, des personnages volants au bout de cables, de la pluie sur scene, des parodies de boys band etc. Le tout en un seul show, asperge de paillettes et de couleurs flashies. Autour de nous, les passagers sont litteralement ecroules de rire, notre voisine de derriere semble au bord de la suffocation. Ils sont fous ces Thais!

Mais a mesure que nous nous approchons de notre but, les voitures s'amoncellent et nous voila bloques dans des embouteillages monstres. Le bus fait des demi-tours absurdes et repasse 10 fois au meme endroit avant d'atteindre la gare routiere. Charly est ronge par le stress a l'idee d'arriver une fois de plus de nuit dans un nouveau pays, sans hebergement, en pleine saison touristique.

22h30: La gare routiere, loin du centre-ville, est un immense chaos ou tout est ecrit en thai. Apres avoir marche 30mn avec nos sacs a travers des couloirs sans fin remplis d'echoppes diverses, nous finissons par trouver ou attendre le bus pour le centre touristique de Bangkok. C'est la que se concentrent toutes les guesthouses bon marche.

Nous attendons la un long moment, au bord de l'epuisement mais rassures par la presence de deux autres routards francais. Le bus arrive enfin et, apres un trajet parsemes de bouchons, nous finissons par sauter du bus au bon endroit. Nous penetrons alors dans Khao San, une rue remplie de musiques, de bars, de touristes, de jeunes thais branches, de marchands ambulants vendant crepes ou cafards grilles, de quelques travestis et prostituees, de danseurs de rue... Epuises, nous sommes assourdis par tant d'animation et de vacarme.

Il est minuit et demi, et apres 17h d'attente et de trajet nous denichons une petite guesthouse, un peu miteuse, mais nous n'avons pas le courage de chercher plus loin. Le lit remplit a lui tout seul notre miniscule chambre au bout d'un minuscule couloir, et les murs sont tellement fins que nous entendons comme si nous etions la musique peu subtile du bar voisin. C'est tellement cheap qu'il y a du lino seulement autour du lit, pas dessous! La patronne nous assure que la musique s'arrete a 1h. Nous partons donc nous balader en attendant et nous nous jetons avec joie sur des Pad Thai (nouilles sautees avec des cacahuetes - delicieuses) et sur des crepes banane chocolat, le tout achete dans la rue. Le ventre plein, ce grand bazar est plutot fascinant!

Seulement voila... Nous retombons sur le Francais de la frontiere. Il nous explique avec un sourire bienveillant (mais oh combien cruel pour nous!) qu'apres le trajet catastrophique qu'il a partage avec nous cote cambodgien, le trajet cote thailandais s'est passe a merveille: bus confortable et climatise, pas d'arret-arnaque, il est arrive directement a Khao San a 9h et a pu choisir son hotel! Nous sommes effondres car il faut se rendre a l'evidence: nous avons eu tout faux! Nous nous demandons alors si la poisse cambodgienne est transfrontaliere.

Nous retournons dans notre chambre et nous endormons au son de rock americain, car apparemment le bar ne faisait que vaguement baisser sa musique apres 1h!

NB de Charly : ce qu'Aglae ne raconte pas, notamment parce que je n'ai ose lui dire qu'une fois parti de la guesthouse miteuse, c'est l'episode du livre de comptes. Lorsque nous sommes arrives a la pension, il a fallu s'enregistrer, comme dans n'importe quel hotel. La gerante cherche un moment le cahier sur lequel elle consigne les arrivees et les departs, le trouve, et l'ouvre devant mes yeux. Un immense cafard en saute (je ne savais pas que les cafards pouvaient sauter), sans declencher d'emotion particuliere autre que la surprise et le rire chez cette femme. Quant au cafard, la maisonnee l'a laisse gambader toute la nuit dans le hall, a ma grande horreur...

Siem Reap 4e jour- Angkor un medecin, Angkor des antibiotiques!

5 février

Charly se reveille toujours brûlant de fievre et avec son horrible mal de gorge. Alors que je commence a me sentir mieux, c'est lui qui est au plus bas; decidement une malediction pese sur nous depuis notre entree au Cambodge! Résignés, nous filons consulter un docteur. Pour garder le moral, nous nous disons que tout ira mieux des que nous passerons la frontiere!

Le docteur ordonne une prise de sang pour verifier que Charly n'a ni le palud ni la dengue. Apres une attente angoissée, ce n'est pas la cas, ouf! Le medecin diagnostique une mysterieuse "tonsilitis" et prescrit de l'Augmentin. Charly file au lit dans notre chambre qui ressemble plus que jamais a une chambre d'hôpital.
Pendant son sommeil, je vais consulter un dictionnaire et decouvre qu'une "tonsilitis" est une angine aigue.

Le soir venu, nous retournons dans le restaurant de la veille (pas celui du cafard bouilli) qui ressemble toujours à une prison, mais où les serveurs sont sympas et la nourriture delicieuse. Mais la malchance nous poursuit, car Charly se retrouve avec un plat super epicé et moi avec un autre plat que celui que j'ai commande!

Nous nous offrons des pains au chocolat aux happy hours du Blue Pumpkin (LA meilleure boulangerie du voyage!) et nous disons:

Demain ça ira mieux, nous sortons du Cambodge!

dimanche 22 février 2009

Siem Reap 3e jour - Angkor des temples et des conflits

4 février

Au réveil, Aglaé va mieux, moi moins bien. Nous nous bougeons quand même pour aller voir ces satanés temples, et tant pis si je me sens fiévreux : notre pass expire ce soir. Décision est tout de même rapidement prise de prendre un tuk-tuk pour faire le tour des temples plutôt que des vélos : la perspective, avec mes frissons, l'envie de vomir et de dormir, de monter sur deux roues et de faire des efforts, me jette presque dans le coma.

Echaudés par l'expérience d'hier, nous abordons les premiers tuk-tuk, et leur expliquons le trajet que nous voulons faire. Notre erreur : trop fatigués, trop énervés, nous commençons à être secs et fermes au lieu de tenter le sourire de façade. Bref, en face les tuk-tuks se braquent à la vitesse de la lumière, se cabrent et soit s'énervent, soit font montre du plus grand mépris, tendance foutage de gueule. Apres 1/2 heure de prix inabordables et de vaines tentatives de negocitions, Aglae etait au bord de tous les etrangles et j'ai donc pris les choses en mains.

Nous marchons quelques mètres de plus jusqu'à entendre le "sir you need tuktuk ?" que nous attendions. Je me retourne en souriant, et commence à marchander, de loin, en riant et en souriant. C'est long mais nous finissons par obtenir un prix décent pour la journée, et montons. Nous nous sommes accordés sur un trajet (aller voir un temple moyennement lointain, et en voir d'autres sur le trajet du retour), mais on commence à sentir la douce odeur des ennuis quand, dix mètres après le départ, notre chauffeur s'arrête, montre un autre chauffeur sur un autre tuk-tuk, et nous dit que c'est comme ça, que ce sera celui-la que nous prendrons, qu'il a dejà une course etc.

Preah Khan
La visite du premier temple, le Preah Khan, terriblement en ruines, mais très grand et très envahi par la végétation, est magique pour Aglaé ; pour moi c'est franchement difficile. J'admets que ce que nous avons vu est très beau, mais les frissons, le mal de gorge et l'envie de m'asseoir à tout bout de champs pour reprendre mon souffle me gâchent un peu le plaisir. Les frissons disparaissent heureusement car la température extérieure baisse à la vitesse de la lumière, dissipant les vapeurs du sommeil, et me faisant pendant quelques heures oublier mon malaise.

Retour au tuk-tuk. Nous nous battons dix minutes pour aller voir un temple distant de 2 km à peine. Lui, feignant, renâcle, dit que ce n'est pas ce qui était entendu, que c'est loin, etc. Nous lui faisons remarquer gentiment qu'il n'était pas là au moment où tout a été "entendu". Il râle et s'enferme à nouveau dans le silence réprobateur qui le caractérisera toute la journée. Ambiance.

Visite d'un ancien bassin royal, couvert de vieilles pierres et de soleil. Les touristes sont plus rares sur ce circuit moins prisé, et le lieu, constitué de 4 grands bassins maintenant à sec, est enchanteur. Alors que nous passons sous une arche cachée dans un bassin, nous découvrons une tête d'éléphant sculptée surmontant un petit autel couvert de cierges et de fleurs. Là, une vieille dame souriante nous redonne foi envers les Cambodgiens du coin. Je lui dis bonjour en khmer, ce qui semble la plonger dans des délices inappropriés. Je lui dis que nous sommes des "balangs", ie des Français, elle glapit de plaisir en français :
- Regardez-ng, la tête de l'éléphang, la tête de l'éléphang !

Ce disant, la voilà qui se met à caresser la tête de la statue avec volupté. Nous lui disons rapidement au revoir, sans savoir au juste si elle est siphonnée, et quand bien même ?

Le Bayon, le retour
Nous retrouvons le chauffeur, qui n'a pas fini de bougonner, et nous ramène au Bayon, temple qu'Aglaé avait un peu raté deux jours avant, et dont les bas-reliefs nous étaient restés cachés. La chaleur est toujours là, et toujours aussi vicieuse ; peut-être même pire que la dernière fois - même si la fièvre a dû jouer. Pour la contrer, nous tentons faiblement de résister en dégustant de succulents ananas frais, vendus partout par ces femmes dont je vous avais parlé. Elles passent leur journée à hurler : "pineappeuuuuuuuuuuuul, coconuuuuuuuuuuuuut, wateeeeeeer" avec un accent cambodgien très prononcé et très drôle. Je passe la journée à leur répondre avec la même voix : "nooooo, i don't waaaaaant".

Nous découvrons donc ces satanées bas-reliefs, que nous parcourons en sautant de l'ombre d'une colonne en ruine à l'ombre d'une autre colonne en ruine. Leur richesse et leur beauté nous font maudir pour la millième fois ce satané guide, qui avait décidé unilatéralement que nous nous en passerions.

Les bas-reliefs garnissant le pourtour du temple, nous décidons de braver les centaines de degrés Fahreneit environnants, afin de revenir vers le coeur du Bayon, et ainsi donner à Aglaé une chance de saisir la magie des visages de Bouddha. La fièvre et la déshydratation en moins, Aglaé se plonge avec bonheur dans les délices de cet endroit si beau, si mystérieux. Je suis rempli de joie de voir qu'elle profite enfin des temples d'Angkor, et qu'en une matinée elle s'est autant rattrapée des jours précédents. Elle déambule à plaisir dans les temples, et ressent enfin les délices esthétiques que je ressens depuis le premier jour, à nous promener parmi ces grands arbres et ces grands amas de pierre monumentaux.

Quoi qu'on en dise, les temples d'Angkor n'ont pas volé leur statut semi-officiel de merveilles du monde. S'y promener est une expérience esthétique unique, et si a priori la perspective de se promener deux, trois ou dix jours au milieu de ruines n'est pas follement excitante, quand on est dedans on se retrouve prêt à y rester des années entières.

Reprendre des forces à l'ombre
Nouveau déjeuner, nouvelle négociation express du bol de soupe de nouilles instantanées et, pour ma part, nouvelle sieste, cette fois-ci vraiment cruciale, afin de faire tomber la température. A mon réveil, ça va un peu mieux : les frissons ont disparu mais la fièvre est encore là. Nous nous promenons donc à un rythme nonchalant, entre les nombreux temples du coin (nous sommes dans l'enceinte d'Angkor Thom, la cité Royale de l'époque). Nous passons devant des structures en rénovation complète (par les Japonais, par les Francais, par les Indiens : tout le monde s'y met pour aider les Cambodgiens), devant d'autres en état de décrépitude avancée, ou d'autres flambant neuves. Nous comprenons mieux alors comment il se fait que le sol d'Angkor, qui contient probablement de grandes richesses, et la promesse de grandes découvertes, n'a toujours pas été fouillé : il y a encore une trentaine de temples à restaurer, sans parler de ceux qui ont été restaurés, et où la nature reprend déjà ses droits. Faire retrouver aux temples du coin leur éclat, une tache de titan, dont personne ne verra jamais le bout...

Notre situation, à l'ombre de ces arbres dont le plus petit dépasse toujours 20 mètres, est idéale pour reprendre des forces, d'autant que la lumière commence à doucement décliner. Au bout de quelques heures de promenade, il nous faut à nouveau insister lourdement pour que notre tuk-tuk, pris à la journée, daigne faire un arrêt en route devant des temples, alors qu'il est à peine 15h. Il nous faudra menacer de rentrer à pied sans payer pour qu'il fasse contre mauvaise foi bon coeur. Bonne ambiance, encore une fois.

Coucher de soleil au milieu des ploucs
Après la visite de deux sympathiques petits templions, nous nous engageons dans la montée du Phnom Kulen, grosse colline qui promet une belle vue sur la jungle, Angkor Wat et le Tonlé Sap, le lac qui couvre une immense partie du pays. Pour y arriver, il est nécessaire de gravir cette montagne, un chemin en montée plutôt douce, qui s'achève par la nécessaire ascension du temple-montagne au sommet de la colline.

Monter en haut de ce temple, après la longue montée de la colline, est particulièrement difficile dans l'absolu, car les marches sont nombreuses et font presque un mètre de haut (sans exagération). Avec la fièvre qui revient montrer ses gros bras, c'est une expérience... autre. J'arrive en haut absolument exténué, tout palpitant, et l'air un peu blême.

Nous remarquons vite que nous ne sommes pas seuls, et l'ascension en éléphant organisée en bas de la colline nous avait mis sur la piste. Si nous nous demandions l'avant-veille pourquoi tous les touristes disparaissaient au moment du coucher du soleil, nous avons maintenant la réponse à nos interrogations existentielles : l'immense majorité a prévu dans son tour de venir voir le coucher du soleil depuis cette montagne. Et il est vrai que la vue est impressionnante : autour de nous, un tapis de forêt, d'où aucun des dizaines de temples de la région n'émerge, excepté Angkor Wat, à quelques kilomètres. Le Soleil semble brûler la surface du lac, loin à l'horizon. Sympathique.

Nous sommes donc littéralement entourés de touristes, et certains sont parmi les plus ridicules du monde, comme si chaque pays avait envoyé le contingent le plus représentatif du pire qu'il avait à offrir. Pêle-mêle, nous avons donc droit aux Japonais qui poussent des hurlements béats, avec casquette à visière et photo tous les quarts de seconde ; aux très gros Américains ; aux Anglais tous rouges ; à la famille thaï bourgeoise, pouffe en mini-jupe dorée et parents pas mieux habillés. Il ne manque que des Chinois pour cracher un peu partout. Tout ce petit monde se serre de plus en plus sur la plus haute plate-forme du temple. Ca pose des photos, ça mitraille dans tous les coins. Aglaé et moi passons plus de temps à photographier les meilleurs phénomènes qu'à observer la vue. J'imagine que moi, avec mes litres de sueur froide déversés chaque seconde, je n'ai pas l'air plus malin...

Angkor des cafards !
Devant l'afflux, nous décidons de redescendre sans attendre le coucher du soleil, qui arrivera dans 30 minutes. La descente est infinie, d'autant que nous croisons sans arrêt des hordes de touristes qui montent. Impossible de savoir comment ils ont tous tenu sur l'esplanade du temple, là-haut, mais nous ne sommes pas très curieux de voir le résultat. Nous rentrons à la maison avec notre tuk-tuk si aimable et le payons. Je prends ma température, et youpi, ma fièvre est à 39°C. La vie est belle. Une aspirine plus tard, nous voilà repartis dans le but de prendre un léger repas avant de reprendre la direction du dodo.

C'est là que tout se complique. Nous décidons de prendre le premier resto sur le chemin, un truc pour occidentaux appelé Special Herb Pizza. Je pense qu'on pouvait aussi se procurer des "herbes" un peu bizarres dans ce genre de pizzas, d'après notre guide, mais on était aussi supposé manger bien. Au moment de notre commande, je demande un thé chaud au citron, seul moyen de calmer mon atroce mal de gorge. Le serveur opine : "yes, hot tea lemon, yes"

Trente secondes plus tard, il revient avec un Coca. "No, no, HOT TEA, TEA, WITH LEMON".

Une minute plus tard, il revient avec un verre rempli de glace et d'un liquide qui doit être du thé glacé, le truc à même de me terrasser vu l'état de ma gorge. J'explose de rire, puis :

"NO, HOT TEA, WITH LEMON"

Encore une caractéristique du cambodgien, et il paraît que c'est une particularité culturelle en Asie du Sud-Est : impossible d'avouer qu'on n'a pas compris, on préfèrera toujours mentir et dire qu'on a compris.

Enfin, le serveur sourdingue revient avec mon cher thé chaud au citron. Je le verse dans ma tasse, et me rend compte avec une surprise non dénuée d'horreur qu'en même temps que le précieux liquide, un cafard noyé a atterri au fond de ma tasse. Et là, trop c'est trop : la maladie, les engueulades avec les tuk-tuks, les vendeurs d'appareil photo, les serveurs, les arnaques incessantes, nous décidons de fuir plutôt que de cautionner ça encore une fois. J'appelle le patron, un gros manchot trapu qui est en train de nous apporter le hamburger d'Aglaé, lui montre le cafard mort dans ma tasse, et lui signifie mon intention de m'en aller, sans payer bien sûr puisque nous n'avons rien consommé. Aglaé est en train de siroter le plus rapidement possible son verre de vitamines prescrit par son médecin, et prend l'air courroucé de la fille qui va partir dès qu'elle aura fini son verre d'eau orangée.

Si nous avons le monopole du cafard, le Manchot, quand à lui, prend la mouche. Il se met à gesticuler et hurler : il nous changera le thé, mais nous allons rester ici, et manger sa bouffe. Hors de question, nous exclamons-nous en choeur ! "No go away !" surenchérit le Manchot, bien décidé à ne pas nous laisser partir malgré ses faillites en grammaire anglaise. Le ton monte à la vitesse de la lumière. Aglaé, son verre de vitamines à la main, tempête et crie que c'est une honte, un resto aussi sale, des cafards dans la bouffe et il fallait qu'on la mange peut-être?, ponctué de "Non mais je rêve!" (en français), que j'étais vraisemblablement le seul à comprendre. Gardant un calme assez surprenant, je regarde ce petit monde s'engueuler. Aglaé s'énerve de façon grandiose et digne, le Manchot, lui, décide de nous barrer physiquement le chemin. Décision d'autant plus dangereuse que maintenant Aglaé a fini son verre, et qu'elle a bien décidé de partir sans manger ses frites goût cafard.

Le Manchot menace d'appeler la police. Aglaé l'enjoint à le faire, avec un sens du bluff que j'applaudis encore : de toute évidence, si le type disait ça dans un pays aussi corrompu, c'est qu'il connaissait des gens de la police. Evidence corroborrée lorsqu'un serveur lui apporte en courant une carte de visite d'un policier. Nous flippons d'autant plus qu'un autre serveur a rapidement fait disparaître la preuve du crime (la tasse et le cafard bouilli), et ce malgré nos protestations houleuses.

Malgré les cris, les 4 ou 5 touristes qui mangent dans le restaurant en même temps, n'écoutant que leur courage, font comme si de rien n'était, et parviennent à regarder ailleurs, malgré la petitesse du restaurant. Merci les gars, vive la solidarité.

Le gars appelle la police, ou fait semblant - nous ne saurons jamais. Pendant ce temps, nous continuons à essayer de passer. De son moignon il fait de grands moulinets, qui me dégoûtent assez de l'envie de tenter le forcing - Aglaé m'avouera plus tard qu'elle était tellement énervée qu'elle n'a même pas vu que le type n'avait plus de doigts !

Aglaé hurle les expressions "French embassy" et "big problems for you" dans des séries qui les rapprochent de plus en plus. Le Manchot semble un peu hésiter, et Aglaé passe en force, en le défendant de la toucher s'il ne veut pas avoir de gros problèmes. Elle le bourre sur le côté, réussit à atteindre la rue, et continue à crier. Je tente aussi de passer, avec mon sac à dos et ma fièvre. Le Manchot me repousse violemment vers l'intérieur du restaurant. Là c'est trop, et j'élève la voix pour la première fois. Rassemblant quelques mots d'anglais un peu au hasard, je l'enjoins de la moins courtoise des manières à aller laver sa cuisine s'il veut éviter ce genre de problème. Devant la puissance de ma voix (je crie rarement, seuls ma mère et mon frère pourront témoigner de l'effet que ça peut faire), le type me fait signe que je dois m'en aller, ce que je fais avec plaisir. Il fait mine de me donner un coup lorsque je passe, à quoi je réplique par une autre menace, et c'est fini. Connard, va! Les touristes n'ont toujours pas bougé.

A peine le temps d'être impressionné par la puissance d'esprit d'Aglaé, qui n'a pas flanché une seconde, alors que la perspective d'un flic corrompu se mêlant à l'affaire n'était pas des plus attirantes, que la voilà qui s'écroule dans mes bras, traumatisée. Je la supporte jusqu'au centre-ville, où nous achetons des mouchoirs pour les larmes, et où nous trouvons un sympathique restaurant thaï où manger de succulentes nouilles, mais il lui faudra de longues heures pour se calmer.

Le restaurant est un concept-resto sur le thème de la prison : élégante façon de voir à quoi l'on aurait échappé, mais l'équipe est assez charmante pour prendre ça à la rigolade. Nous retournons nous coucher, en faisant un petit détour pour ne pas passer devant le resto du Manchot, et allons nous effondrer sur nos lits, elle avec sa peur-rage, moi avec ma maladie.

vendredi 20 février 2009

Siem Reap 2e jour - Angkor malade!

3 fevrier

(Aglaé) Reveil difficile: j'ai tres tres mal a la gorge et a l'oreille, en plus du mal de bide qui me poursuit depuis mon entree au Cambodge. Je me dis que je touche le fond et que surtout je ne vois pas le rapport entre tous ces symptomes. Je reveille Charly. Le monsieur de notre guesthouse nous informe que la clinique conseillee par le Lonely Planet n'existe plus. Sachant qu'il ne faut pas aller dans n'importe quel hosto au Cambodge, ca commence bien! Il nous conseille L'International Royal Hospital.


Nous negocions une moto-taxi car c'est assez loin. Nous arrivons dans un hopital tres grand et tres chic... on se precipite pour nous ouvrir la porte. Nous trouvons ca louche et nous enquerons du prix d'une consultation chez un generaliste. On nous repond avec un grand sourire: 120 dollars!

Je me sens mal, mais pas a ce point la!

Nous finissons par trouver une clinique serieuse a prix plus raisonnable. Le docteur me diagnostique une grosse infection intestinale et une amygdale attaquee par les bacteries qui sont remontees dans ma gorge lors de mes "visites de musees". D'ou la douleur quand je deglutis et la torture a chaque bouchee avalee (meme pour de delicieux pancakes, ce qui est quand meme triste!). Je suis surtout completement deshydratee et a bout de forces. Il me prescrit des antibios, des vitamines et, rassuree, je vais me coucher.

Moral en chute libre...

Depuis notre entree au Cambodge, on ne peut pas dire qu'on ait vraiment eu de la chance, mais etre au fond de mon lit alors que j'ai un pass trois jours pour Angkor et que je n'ai pas reussi a profiter du premier jour, c'est trop! La veille, c'etait la premiere fois du voyage que la fatigue prenait le dessus: d'habitude les vieilles pierres me donnent des ailes, meme en hypoglycémie ou malade! Mais la, les splendides temples sont dehors et moi enfermée dans cette chambre sinistre... C'est rageant.

Charly part raconter nos dernieres aventures au Laos sur internet pendant que j'essaie de me résigner et de dormir.


Il faut sauver le soldat Aglae!

Voyant mon moral atteindre des profondeurs abyssales et que j'ai repris quelques forces en dormant, Charly propose de tenter de sauver cette journee pourrie. Le plan: aller voir un petit temple isole et loin de tous les autres, qui est le plus finement sculpté d'Angkor.

Mais pour réussir la mission, il faut passer par la case marchandage. Le temple est a 37 kilometres de la ville et y aller en tuk-tuk est hors de prix. Nous décidons d'y aller en moto-dop, mais tous les conducteurs nous repondent invariablement: it's sooo faaaaaaaaar! en ayant deja l'air épuise rien qu'en en parlant. Un nous explique meme qu'il est bien là, à attendre sous un arbre, et qu'il ne voit pas pourquoi il bougerait!

La faineantise des habitants de Siam Reap est decidement sans limites... Les explications rationelles comme "mais on vous paie le prix d'une demie-journée pour a peine 2h de travail!" ne pèse pas lourd contre le fameux "but it's sooo faaaaaaaaaar!"

Un jeune conducteur semble prêt a accepter notre offre, mais les plus vieux autour de lui font pression pour qu'il refuse. Je suis à bout de patience: je veux voir des temples, je la conduis s'il le faut leur foutu moto! Excedee, je balance au jeune conducteur qui hesite depuis 15 bonnes minutes que j'en ai ras-le-bol d'attendre plantée au soleil, que je suis malade et que s'il ne veut pas faire de course et bien tant pis pour lui!

Apres plus de 30mn a errer dans les rues et tenter de negocier, je me vois deja retourner me coucher. Mais la miracle... apres 30 mètres de marche, le jeune conducteur de moto s'arrete près de nous (et hors de vue des autres conducteurs) et nous dit le tant attendu: "ok, ok!"

Commence alors un trajet superbe a travers la campagne et la jungle, dans la lumiere déclinante du coucher du soleil. Le conducteur fonce, nous n'avons pas de casques, mais il evite habilement les nids de poules donc nous sommes a peu près rassurés (CMA: nous n'avons aucun doute sur votre forte désapprobation, mais nous n'avions pas d'autre solution!).

Nous atteignons enfin notre but: le Banteay Srei. Ce temple est tout petit, la chaleur est tombee, l'idéal pour une visite breve mais enchanteresse. Le temple est désert, la lumiere splendide et les petites apsaras (danseuses sacrees) de pierre semblent prêtes à se mettre à danser... Des serpents fabuleux à multiples tetes se tortillent au-dessus des portes, des sages meditent dans une flamme le long des colonnes... Je revis!

Le gardien ferme le temple derriere nous et nous rentrons. Nous retrouvons Josh pour le diner, dans un restaurant où on peut nourrir de gros crocodiles vivants dans un bassin. Je ne suis pas d'une grande conversation et j'ai un mal fou à avaler ma nourriture, mais au moins j'ai vu un temple splendide aujourd'hui!

Et puis... ça ira mieux demain!

Splendeur des temples, malaises et guides fainéants

Attention description d'une longue journee, longueur du message en consequence!
2 fevrier

Nous avions cru qu'Aglaé était guérie, vu que la veille la Miss avait marché son heure et quart sous le soleil, écrasée par son sac à dos, en mouftant mille fois moins que moi. Nous nous levons donc à l'aube pour rejoindre Delphine, Hubert et Anton, qui doivent nous retrouver en tuk-tuk au comptoir des billets pour la zone des temples d'Angkor.

Les vélos que l'on peut louer à Siem Reap ont une caractéristique commune, quelle que soit la pension où on les loue pour 1 ou 2 dollars : leurs freins sont lâches, leur direction hasardeuse, la selle rappelle les tourments de l'enfer, et leur construction date probablement de celle des temples d'Angkor. Autant dire que c'est un plaisir de les monter.

La billetterie d'Angkor Wat, qui donne accès à la trentaine de temples du secteur, est particulièrement bien organisée. Pas étonnant, étant donné 1) l'afflux de touristes 2) que la société (privée) qui s'en occupe, la Sokimex, empoche 15% de la gigantesque manne financière du truc, ne reversant que 10% à la société de conservation des temples (alors que la moitié des temples n'a pas encore été complètement restaurée), laissant 70% qui vont plus ou moins mystérieusement remplir les caisses du gouvernement cambodgien - quant aux 5% restants, allez savoir... Ne cherchez pas à savoir pourquoi c'est une société pétrolière qui s'occupe de l'organisation des temples d'Angkor (billetterie, contrôle, etc), personne ne le sait tout à fait.

Nous nous retrouvons rapidement en possession d'un joyeux pass avec nos visages pas réveillés en photo dessus, tout ça pour la modique somme de 40$ pour 3 jours, et retrouvons les Français et l'Italien. Nous faisons à l'occasion la connaissance du guide, un type au premier abord assez rigolo, avec un chapeau de cow-boy. Tres souriant, tout ca. Nous suivons le groupe avec nos velos, et nous les retrouvons devant Angkor Wat, le plus grand edifice religieux du monde (rien que ca).

Wat the fuck ?
Angkor Wat, gigantesque, opulent, monstrueux presque. Pour tous les details, se referer a Wikipedia. S'y pointer a 7 heures du matin, un peu fatigue, carrement pas bien en ce qui concerne Aglae, semble la maniere forte de commencer notre visite des temples de la zone. En Inde cette methode avait carrement marche, le jour de Noel, devant le Taj Mahal. Ici, les resultats sont carrement plus mitiges : le guide enchaine les blagues un peu vaseuses et les explications dans un desordre des plus chaotiques, et la magie a du mal a operer. Une des raisons est simple : au matin, ce temple qui donne vers l'ouest est a contre-jour du soleil levant, du coup les photos sont ratees et l'impression n'est pas aussi puissante qu'au coucher du soleil.

Alors oui, Angkor Wat est immense, et de loin on dirait un Versailles khmer, mais il a surtout une enceinte gigantesque. Ce qui le rend interessant, c'est son etat de conservation quasi-parfait : les delicats bas-reliefs de plusieurs centaines de metres semblent avoir ete sculptes hier, et leur richesse et leur profusion n'a pas fini d'etonner. Mais quant au temple lui-meme, son architecture, etc, difficile de se faire une opinion, car une fois devant on manque la vue d'ensemble. En bref, l'emerveillement attendu n'est pas la. Surtout chez Aglae, en proie a un malaise assez profond - elle sue, elle rougit, elle hennit, et son enthousiasme legendaire pour les vieilles pierres semble absent, ou bien se fait in petto. Autant dire que moi, celui qu'elle a convertit a la peinture et a l'architecture, celui qu'elle a traine partout, avec qui elle partage toujours des enthousiasmes puissants et communicatifs, autant dire que moi, donc, je me fais un sang d'encre.

Point de doute possible, Aglae est Angkor malade.

Quant au guide, il nous fait voir les bas-reliefs a un rythme de plus en plus accelere. La profusion d'explications se transforme vite en quelque chose qui ressemble a un compte-goutte, mais nous ne remarquons rien pour l'instant. La ou le bon guide fait aimer en montrant qu'il aime, le notre se contentera toute la journee de nombreux "voila regardez c'est magnifique".

Mystique Bayon
Je vous connais, petits incultes. Vous avez surement deja vu ca, et pourtant le nom du Bayon ne vous dit pas grand-chose. Eh bien sachez qu'il s'agit du second temple le plus visite de la zone. Comme vous le verrez sur la premiere photo de la page Wikipedia, de loin le temple evoque un vieux tas de ruines. Mais a l'inverse d'Angkor Wat qui decevait de pres et imposait de loin, une magie incroyable s'eleve au fur et a mesure que le visiteur monte les marches (toujours tres hautes dans cette region), et decouvre les fameux innombrables visages.

Il parait qu'ils ont tous une expression differente. Plus que ca, ils ont chacun un degre de delabrement different, ce qui donne une impression tellement... unique, oui c'est ca. Visages multiple, impression unique : il y a un moment ou, en haut du temples, ou que porte votre regard, 5 visages (tous sont des visages de Bouddha, ndrl) au moins vous regardent, avec un petit sourire fin - mais certains n'ont plus qu'un oeil, le haut du visage, ou bien ont perdu tout un profil. Et comme tous ces visages sont composes de plusieurs pierres, emerge sans arret l'impression d'etre dans une peinture cubisto-khmer. Delirant, troublant : le Bayon est sans doute possible mon temple prefere.

Quant a Aglae, sa "visite" ne lui aura pas permis de vraiment apprecie le chef-d'oeuvre artistique : lorsque le guide prendra une pause pour nous laisser nous promener dans le temple, elle s'assira a cote de lui pour souffler, et ne verra quasiment rien. Il faut aussi preciser qu'il est presque midi, et que la chaleur est absolument epouvantable. Passer de l'ombre a la lumiere devient une torture insupportable.

Cyclistes malgre tout
Aglae se sentant vraiment mal, c'est Hubert qui conduit son velo, m'accompagnant par la meme occasion jusqu'au prochain temple, alors qu'Aglae emprunte le tuk-tuk avec les autres. Se promener dans l'enceinte de cette ancienne cite gigantesque est assez magique : des routes confortables et bien tracees font comme une saignee dans une jungle absolument impenetrable, de laquelle emergent a intervalle regulier des temples, des bassins royaux, des tas de pierres indefinissables, et plus souvent encore des cars de Japonais.

Plus nombreux que les quelques singes apercus, qui d'ailleurs passent leur temps a chasser les chiens, les Japonais font une entree fracassante dans notre voyage. Alors que nous nous demandions ou ils etaient dans les pays precedents (c'est vrai, quoi, le tourisme sans touristes japonais, est-ce encore du tourisme?), la foule nippone, avec son cortege de gros bus, de gros appareils photos, de casquettes a visieres et de vetements des annees 80, rattrape son retard a Angkor. Au point que nous croisons sans arret des guides parlant japonais, qu'ils soient nippons ou Cambodgiens.

(je precise que la premiere phrase du paragraphe precedent, au sens un peu flottant, ne visait en aucun cas a faire de rapprochement delictueux entre nos amis les Japonais et nos ennemis les singes)

Nous ralentissons un poil, le temps que le guide nous montre la curieuse Terrasse des Elephants, et une statue de cheval a 5 tetes. Pour la troisieme fois au moins, je lui pose une question a laquelle il repond "good question", avant de botter la balle en touche avec une reponse incoherente. Je commence a sentir les limites du guide, quant a Aglae, elle ne sent plus grand chose.

Nous repartons avec Hubert derriere le tuk-tuk. Le guide, a l'interieur, semble vraiment courrouce que nous soyons en velo, et voudrait que la visite aille plus vite : il ira meme jusqu'a nous proposer de nous accrocher au vehicule, depuis nos velos (CMA: hautement dangereux et cassegueulisant, bien entendu). Il faudra le tact d'Aglae pour le calmer "if you want, you can take the bike instead of them", mais nous comprendrons le soir venu que tout ca n'etait que le revers d'une arnaque destinee a faire rentrer et le guide et le tuk-tuk plus tot a la maison. J'y reviendrai.

Apres un trajet toujours aussi enchanteur a l'ombre d'arbres gigantesques, nous arrivons devant le Ta Prohm, pour la pause dejeuner. Il faut savoir que depuis notre entree dans la zone d'Angkor, devant chaque temple se trouvent de 20 a 30 restaurants, petites paillottes separees par des bambous, proposant tous exactement le meme menu. La caracteristique commune des serveuses est la suivante : des qu'un touriste passe dans son champ de vision, la serveuse court vers lui en hurlant. Si c'est l'heure du dejeuner, elle tiendra un menu a la main, sinon ce sera un sachet d'ananas decoupe, ou une bouteille d'eau.

Conseil d'Etat, et ca repart
En arrivant devant les restaurants, nous constatons sans surprise que les prix sont delirants, en tout cas pour le niveau de vie du pays : des nouilles instantanees pour 4 dollars environ, soit environ 4 fois le prix habituel. Mais Hubert et Delphine nous font vite comprendre qu'il est largement possible de negocier. En effet, des qu'ils prononcent le mot "discount", tous les plats tombent a 2 dollars 50, pas etonnant vu la concurrence. Pendant ce temps, je fais semblant de ne pas etre tente, je cherche Anton qui a disparu aux toilettes et fais croire a la serveuse qu'a cote on m'a propose moins cher. Soudain, une serveuse fait un dernier geste desespere :

"ok ok, food and drinks, 2 dollars each person"

Sans que j'aie fait grand-chose, nous nous retrouvons avec des prix absolument delirants : on va pouvoir se gaver de noix de coco fraiches et de nouilles pour rien. Hubert, Delphine et Aglae me rejoignent, heberlues et surtout persuades que la negociation est a mon credit. Je sais que je n'ai pas fait grand-chose mais ils me tiennent deja pour un heros. Je mange mes nouilles en heros, et vais me jeter dans un hamac libre, don du Ciel de ce petit restaurant - le guide et le tuk-tuk sont alles manger de leur cote, et dorment deja.

Je commence a m'endormir, quand j'entends quelques echos inattendus de la part d'Aglae : Hubert et Delphine lui ont demande des explications sur son stage au Conseil d'Etat, et contre toute attente, la voila qui part dans de longs monologues explicatifs, veritable cours passionnant et passionne sur le fonctionnement d'une institution pas tres folichonne sur le papier. Je m'endors heureux, car Aglae semble avoir repris du poil de la bete. A mon reveil, je retrouve ma compagnon de voyage, moribonde il y a quelques minutes, avec un grand sourire et les yeux illumines : le miracle des institutions francaises a eu lieu, meme loin de Paris.

Tant pis pour Ta Prohm
Le dernier des 3 temples les plus celebres d'Angkor est le Ta Prohm. Si vous voyez les photos sur internet les plus insolents d'entre vous vont hurler "ah mais oui, bien sur, Tomb Raider, Indiana Jones". Avant d'etre ca, le Ta Prohm est un tres vaste complexe religieux, qui a ete envahi par la vegetation pendant 400 ans, vegetation qui n'a pas ete arrache pendant les premiers travaux de restauration : enlevez certains des arbres qui ont pousse a travers les murs, et le tout s'ecroulera.

Plus que le pourtant admirable travail architectural et sculptural des khmers, c'est la puissance artistique de la nature qu'on vient admirer ici. Dans ce temple ou il est facile de se perdre, ce sont les branches, les troncs, les lianes, qui font leur petit effet, et qui donnent, ne serait-ce que jusqu'a l'apparition du prochain groupe de Japonais, l'impression d'etre un decouvreur. Aglae, soudainement et inexplicablement reveillee, s'en donne a coeur joie. Elle pousse des petits hoquets d'emerveillements, et assaille le guide de questions, ce qu'elle n'avait pas eu la force de faire jusqu'alors. Celui-ci, de plus en plus faineant, s'est contente de deux ou trois "c'est beau, hein", nous donne le nom d'un des arbres qui a traverse les murs (tch'pong), et se terre dans un silence des plus noirs. On le sent de plus en plus presse, mais nous ne nous faisons pas de souci : Hubert et Delphine l'ont pris pour la journee. En tout cas, le Ta Prohm est fantastique.

Josh again
Au hasard des detours du temple, nous tombons nez-a-nez avec une vieille connaissance : Josh, l'Americain avec lequel Sylvia et nous avions echange quelques bieres a Si Phan Done (au Laos). Nous sommes ravis de rencontrer a nouveau un type aussi sympa, d'autant que nous n'avions pas vraiment echange nos coordonnees. Rendez-vous est pris le soir meme devant une bonne boulangerie de Siem Reap, et le voila qui disparait dans la vegetation.

Notre guide nous quitte
Quelle surprise lorsque, une fois sortis du temple, notre guide s'exclame :
- Thank you very much, I am now finished with you
- But it's only 3 o'clock !!!
- Yes, but I've worked 8 hours, so now it is home sweet home.

Nonobstant l'absurdite de sa reclamation de 8 heures quotidiennes, dans un pays ou les enfants travaillent surement tres longtemps et pour pas grand-chose, nous faisons le compte et remarquons que notre guide inclut la pause-dejeuner et les trajets. Je songe un instant a le presenter a un syndicat de cheminots...

Toujours est-il que Hubert et Pauline ne veulent ou ne peuvent pas trop reagir, d'autant que le guide a bien prepare son arnaque : il demande au tuk-tuk de mettre le moteur en marche pour mettre la pression a tout le monde. Evidemment, Hubert et Pauline ne peuvent le laisser la, mais pourtant ils avaient loue un guide et un vehicule a la journee (plus precisement jusqu'a 5h30), et ils vont devoir rentrer a 3h30, sachant que c'est leur dernier jour a Angkor. Nous avons nos velos et continuerons la visite, mais eux sont degoutes par tant de mauvaise foi. Nous constaterons les jours suivants, et en en parlant avec ma mere, que l'arnaque est coutumiere du coin : un guide vous dit "oui oui la journee entiere, on fera ce trajet, qui va de Angkor Wat a Ta Prohm, en passant par le Bayon", vous croyez innocemment que vous ferez TOUS les temples sur le chemin, ou que le guide pourra remplir sa journee avec ceux-la.

Mais non, le guide se depechera de tout faire pour pouvoir vite rentrer a la maison. Nous comprenons maintenant pourquoi notre usage des velos l'enervait, car ca le retardait : il aurait pu finir son tour a 13 h, peut-etre ! Nous nous rendons compte avec Aglae que ce guide pourtant officiel et entraine etait un vrai rigolo, et en y repensant la liste est longue : explications breves, chaotiques, superficielles, reponses toujours vagues, utilisation circulaire de 4 blagues vaseuses au maximum, faineantise impensable... En consultant notre guide, nous realisons meme que ledit guide n'a pas fait mention de 1km(!) de bas-reliefs incroyables autour du Bayon.

C'est le debut de notre histoire d'amour avec la faineantise des Cambodgiens lies au tourisme, specialement a Siem Reap ou, forcement, les dollars tombent en continu , car les touristes n'arreteront jamais de venir admirer les temples.

Heureuse fin de journee
Une fois debarrasses de ce guide, dont les explications recoupaient, en plus vivantes toutefois, celles de notre guide, nous partons a l'assaut de deux petits temples anonymes, sur le chemin du retour (environ 8 km tout de meme). Il est frappant de constater a quel point deux facteurs nous donnent l'impression de devenir soudain des archeologues : 1) au moment du coucher du soleil, tous les touristes partent l'observer en haut d'une montagne qui donne sur Angkor Wat 2) des qu'on sort de la trilogie Angkor Wat/Bayon/Ta Prohm, le nombre de touristes au kilometre carre approche du zero.

Intense sensation qui est celle que l'on eprouve lorsqu'on fait l'ascension d'un temple vide, lorsqu'on roule un bon kilometre dans une piste en sable jusqu'a atteindre un temple quasiment oublie. Fraicheur des vieilles pierres, finesse de l'architecture, encore, cette fois doublee de l'impression, si belle meme si toujours fausse, d'etre le premier a voir ca. Et la magie qui n'avait pas marche sur le plus gros des temples de se saisir a nouveau de nous sur les plus petits.

Le retour est long mais nous sommes enchantes, d'autant qu'Aglae a pu se reveiller a temps pour vraiment jouir des temples de l'apres-midi. Nous sommes tous deux neanmoins inquiets quant a sa sante, et decidons d'aller chez le medecin le lendemain si son etat empire. Nous oublions toutefois ces irritants problemes, le temps d'un diner en ville avec Josh. Celui-ci, toujours aussi drole, nous enchante d'anecdotes et d'histoires effrayantes. Il a repere un restaurant ou on peut nourrir des crocodiles, rendez-vous est pris pour le lendemain. En partant du restaurant, nous devons encore corriger l'addition... Encore une fois, Aglae montre qu'elle a des reserves d'energie, en se ruant sur les happy-hours du Blue Pumpkin, boulangerie de Siem Reap inspiree du design de Starck (?).

Dans l'oeil du cyclone...

1er fevrier

Apres 3 jours un peu durs, je me reveille en forme. Ouf! Je me dis alors que c'est dommage, que je suis passee a cote de Phnom Penh, mais que bon 3 jours a se trainer sur 6 mois de voyage, c'est le prix a payer. J'avais miraculeusement profite de Delhi avec une infection pulmonaire, alors tant pis pour Phnom Penh!

Le souvenir qui m'en reste est surtout la visite du S21 dont Charly a deja parle. Le travail de memoire reste entieremment a faire dans ce pays: toutes les personnes de plus de 30 ans ont vecu le genocide, et pourtant, seuls les etrangers visitent le S21. Personne n'a encore ete juge et on cherche encore des charniers pour essayer de denombrer le nombre reel de victimes... Les temoignages des anciens bourreaux sont saisissants car ils se considerent tous comme des victimes. Pas un n'exprime le moindre regret: "je n'avais pas le choix". On mesure a quel point les grands proces de Nuremberg et de Tokyo ont, meme imparfaitement, permis a l'Europe de faire son travail de memoire. Au Cambodge, ni les bourreaux, ni les victimes n'ont ete reconnus.

Au programme: Pop Khmere et film d'action
Nous embarquons a bord d'un bus a destination de Siem Reap, la ville a cote de laquelle se trouvent les temples d'Angkor. Nous apprecions enormement d'etre dans un bus local, entoures de cambodgiens. En effet, les laotiens se deplacant peu, nous etions toujours entoures de touristes dans les bus locaux du precedent pays. Cela nous a permis de faire des rencontres sympathiques, mais apres le bus touristique/arnaque pour arriver a PP et notre difficulte a nous immerger dans la ville, nous sommes contents d'etre les seuls touristes.

Des clips de pop khmere degoulinante passent en boucle. Nos oreilles agueries les differencient facilement de la pop lao (la qualite est un poil meilleure), et nous reconnaissons meme le hit du moment, que des amateurs avaient interprete la veille, a la radio-crochet du marche de nuit de PP. C'est un enieme chanteur a la coupe ridicule, pas viril pour 2 sous, qui se lamente de ne pas etre aime par l'elue de son coeur, de preference sous la pluie. Absolument tous les clips racontent cette meme histoire: en Asie, avoir le coeur brise rend sexy!

Mais le meilleur reste a venir: un film d'action thai nationaliste (Born to Fight). Un village est pris en otage par des mechants militaires et apparemment, tous les villageois sont alles aux jeux olympiques. Ils se battent sur des poutres, des barres fixes et paralleles, en faisant du foot ou bien sur de la boxe thaie. C'est tres drole mais ca devient completement hilarant quand le heros, crible de balles, se releve miraculeusement apres avoir regarde une piece de monnaie. Pourquoi? Mais parce que sur la piece, il y a le Roi de Thailande! Il la glisse alors sous le bandana qui sertit son front et tue les mechants un a un!

Il faut savoir qu'en ecrivant ces sarcasmes sur la monarchie thaie alors que je suis encore en Thailande, je risque 7 ans de prison pour crime de lese-majeste!


Le trajet passe donc vite, je me sens mieux, nous avons le sourire aux levres et nous nous disons que nous allons enfin profiter du Cambodge!

grave erreur...



The poisse is back!

Notre Lonely Planet nous indique que la station de bus n'est pas loin du centre-ville de Siam Reap. Nous refusons donc allegrement les offres des tuk-tuk et commencons a marcher sous le soleil, avec nos gros sacs. Au bout d'un moment, nous realisons que la gare routiere a du etre deplacee. Je propose de continuer a marcher, car aujourd'hui mes jambes me portent! Croisements apres croisements, la ville semble s'etendre a l'infini et le centre reste invisible. Au moment ou nous allons abandonner, nous reperons ou nous sommes sur la carte du Lonely Planet. Nous nous disons que puisque nous avons deja tant marche, autant faire a pied les 600m qui restent jusqu'a notre guesthouse...

Sauf que nous nous perdons et tournons en rond, toujours avec nos sacs sur le dos, leurs poids semblant augmenter a chaque pas. Quand nous atteignons notre guesthouse, nous avons marche 1h15 et nous sommes degoulinants et epuises. Entre mon entetement a continuer a marcher au debut et Charly qui a loupe un croisement, c'est l'echec total!

A toute chose malheur est bon : juste avant d'atteindre notre pension, nous croisons par hasard Delphine et Hubert, les amis de Davy avec qui nous avions dine a Phnom Penh.

Apres nous etre rafraichis, nous les retrouvons pour diner, et convenons de nous retrouver le lendemain a 7 h afin de partager un guide. Je m'etais auparavant perdue pour aller au resto-point de rdv, et j'avais par la meme occasion indique le mauvais chemin a un etudiant italien, Anton, qui decide de se joindre a nous, et pour le diner, et pour le guide.

Nous nous ecroulons dans notre chambre qui est plutot propre mais ressemble vraiment a une chambre d'hopital.

C'etait un signe...

samedi 14 février 2009

Lettre à maman Aglaé

Chère Maman d'Aglaé,

Je vous donne des nouvelles de votre fille. Elle se nourrit très bien, et culinairement, elle change à vue d'oeil.

Depuis que nous avons quitté la France, ses fromages qui la font hurler, ses fruits de mer qui la font pleurer, ses sauces et mélanges qui la font sangloter, votre fille s'est métamorphosée.

Pourtant, les Indiens, les premiers à lui présenter leurs assiettes richement garnies, avaient tout pour la dissuader d'être une aventurière de la fourchette. Sauces riches, mélangées, cuites des heures avec la viande = impossibilité de séparer la sauce de la garniture de la viande. Epices abondantes, diverses, brûlantes, souvent inconnues = du nouveau à chaque fois, et impossible de savoir VRAIMENT ce que l'on mange (sans parler des conditions d'hygiène ah ah ah).

Et pourtant, chère maman d'Aglaé, après deux jours d'inquiétude, très vite votre fille s'est jetée à l'eau, ou plutôt devrais-je dire dans la marmite de riz basmati. Attention, je ne dis pas que ça s'est fait d'un coup, ni sans à coups. Il a fallu patienter, il a fallu fermer les yeux sur les fois où elle était "trop fatiguée", "trop malade" pour tenter de nouvelles expériences culinaires. Mais dans l'ensemble, c'est dans les moments où elle était le plus acculée (boui-bouis indiens où il n'y avait pas de choix) qu'elle s'est révelée la plus vaillante. Elle a fait comme les Indiens, et a orienté les plats autour du Pain, son Amour de toujours (je me console d'être un Amour plus récent mais plus passionné). Il faut dire que les Indiens, question pain, avaient fait quelques efforts pour la ravir : chapati, naan, rotis et autres pooris ne sont que des variations inventives autour du Sacré Sacro Saint Pain si cher aux Franchouillards.

J'aurais aimé que vous puissiez voir de vos propres yeux votre fille s'emparer d'un Dosa (grande crêpe du Sud), la plonger avec entêtement dans une sauce verdâtre ou orangeâtre à la composition inconnue du commun des mortels, la retirer dégoulinante pour l'enfourner dans son délicat museau ! Oh que vous auriez été contente ! Quelle vengeance sur les longs repas que vous avez dû passer à essayer de lui faire manger autre chose que d'habitude !

Certes votre fille n'a pas mangé non plus des choses incroyables, telles que des Crevettes, mais elle a quasiment tout goûté, et pour ça, elle mérite un Vin sur Vin. Curry de poissons épicés, crêpes aux oignons au petit-déjeuner, elle m'a surpris et me surprend encore.

Mais chère maman d'Aglaé, il fallait aussi la voir réclamer, les soirs de grand vent, un bon thali, comme les gens d'ici : du riz à prendre avec les doigts, pour en faire de grandes boulettes à tremper dans la sauce.

Momos et autres contrariétés
Sitôt franchie la frontière du Népal, ladite Aglaé, vostre progéniture en personne, s'emparait de momos, beignets vapeur, baignant dans la graisse, dont la viande hachée avait souvent une provenance douteuse. Qu'importât qu'elle tombât malade, et qu'importât que j'usas du subjonctif passé n'importe comment, pourvu qu'elle puisse goûter du nouveau ! Madame, votre fille est changée.

Souvenez-vous même de ce message où elle racontait avoir goûté tout ce qui passait dans son assiette. Eh bien contre toute attente elle ne mentait pas !

(d'odieuses rumeurs insinuent même qu'elle aurait mangé de bon coeur du paneer, fromage non fermenté indien, avant que je lui fasse remarquer qu'il s'agissait de fromage, et qu'elle décide de nier qu'elle en eût jamais ingurgité un gramme)

Bref, je suis le plus heureux des partenaires de table, Madame, et l'Asie du Sud-Est n'a qu'encouragé le goût pour l'aventure de bouche : croyez-vous que les saveurs sucré-salé-amer-acide, toujours co-présentes dans la nourriture de cette région, lui aient fait peur ? Que nenni, madame, que nenni ! Après un temps d'adaptation, noix de coco, brins de ciboulette, de citronnelle, de menthe et de coriandre se sont engouffrés, souvent en même temps, dans un embouteillage de saveurs et une explosion de différences, noyées dans la sauce, frites ensemble, pleurant de joie de goûter enfin aux papilles de la célèbre Aglaé, et vous savez le plus fort, madame ?

ELLE EN REDEMANDE !

(bon, là, elle est malade de façon discontinue depuis 10 jours, donc elle se rabat sur du riz blanc-omelette et des soupes de nouilles, mais elle n'a pas dit son dernier mot)

Phnom Penh jour 3 - le Khmer à boire

31 Janvier

Désolé d'être le seul à écrire (rarement) ces derniers temps, mais Aglaé est un peu malade (si si encore!), et a du mal à trouver temps et énergie pour écrire + nous avons été sur des plages paradisiaques en Thaïlande, et nous n'avons eu aucun accès à internet.

Forts de notre formidable journée précédente, nous passons la matinée sur internet, avant de rejoindre Davy pour un déjeuner. Aglaé se sent encore trop mal, et va raisonnablement se coucher pendant que Davy et moi, pour faire monter la faim, visitons le proche Psar O Russei, un des plus grands marchés de la ville. L'avant-veille nous avions visité un marché assez art déco, le Psar Thmei, qui était en train de fermer, et qui était donc calme, là c'est le bordel absolu.

Le Psar O Russei est en effet un dédale absolument sans fin, et où l'on trouve de tout, du savon aux montres à l'effigie des dirigeants du Parti Communiste, labyrinthe de babioles qui ferait pâlir de jalousie les bazars arabes. A l'entrée du Psar Thmei (celui de l'avant-veille, si vous suivez), nous avions été fort choqués par un stand d'insectes grillés (cafards, blattes, criquets et gigantesques araignées noires), ici c'est le simple mélange des fumets des poissons séchés, des intestins de porcs à l'air libre et du durian (le fruit dont l'écorce pue tant qu'elle est interdite dans les avions et les trains) qui nous pousse à fuir au plus vite vers des régions plus calmes.

Ma tante m'avait parlé de beaux bijoux en argent, nous ne voyons que des fausses Rollex et des DVDs de contrefaçon.

Une fois dehors, le côté louche des Cambodgiens refait surface. En effet, depuis notre arrivée, tous les restaurants se trompent systématiquement dans les additions (parfois de 20 centimes d'euros, parfois de 10 dollars), et il fallait toujours recompter, sans savoir s'ils le faisaient exprès ou pas (beaucoup sont peu éduqués). Une fois dans un petit restaurant avec Davy, l'assiette "large" pour deux voire trois se transforme en minuscule plat pour 1 personne à peine. Nous décidons de ne pas râler, mais c'est assez énervant. Davy est persuadé surtout qu'on nous donne systématiquement la carte pour touristes avec les prix pour touristes. Je décide de prendre ça à la rigolade, et de leur accorder le bénéfice du doute.

Second musée, second vomi

Nous réveillons une Aglaé décidément en forme internationale, et partons à l'assaut du Musée National, qui est principalement une collection de statues de l'époque fabuleuse d'Angkor. Cette époque représente le pic de puissance du pays, celle où précisément furent construits les temples les plus grands et les plus vieux du monde. A savoir qu'Angkor est LA fierté nationale : de la bière Angkor au drapeau du pays (le temple d'Angkor Wat sur fond rouge et bleu), les trois tours sont partout, et semblent vouloir conjurer le passé du pays depuis cet Age d'Or : déclin inexorable, annexion des territoires par les Thais, les Vietnamiens puis les Français, horreur des Khmers Rouges, interminable guerre civile qui s'ensuivit.

Angkor est le témoin d'une gloire passée, c'est tout ce qui leur reste, et c'est déjà pas mal...

Les statues du Musée National sont très belles, mais il nous est assez difficile d'en profiter : au bout de 10 minutes, Aglaé court à nouveau aux toilettes pour aller vomir. Je commence à croire que les musées lui font tous le même effet. Pendant ce temps, je parcours le musée avec Davy, mais nous sommes plus intéressés par des discussions sur nos amis communs que par les statues - il manque les explications et les commentaires passionnés d'Aglaé pour y insuffler la vie nécessaire à l'admiration.

Aglaé ressort des toilettes livide, et nous sommes désolés pour Davy qui ne sait plus quoi dire, ni où se mettre. Elle arrive tout de même à s'enthousiasmer pour le reste du musée, mais doit s'asseoir fréquemment, comme une dame âgée, et tente à tout prix d'être plus blanche que moi (ce qui est très difficile, vu ma paleur naturelle).

Bagarre d'appareil
Nous marchons jusqu'au Riverside, le coin des touristes, où nous devons aller récupérer notre appareil photo. Il faut savoir que depuis notre balade en éléphant au Laos, notre appareil foirait complètement dès qu'il s'agissait de faire une photo un peu zoomée, et cela nous pesait un peu. Nous avions donc déposé i-celui chez un réparateur dès notre arrivée à Phnom Penh. Le tarif était d'ailleurs complètement dingue, genre 30 $, pour une réparation qui en coûte en général 100 en Europe. Nous étions donc tous contents de le récupérer au magasin, et la vendeuse nous le tendait avec un sourire. Notre "problème" était résolu, et nous pouvions à nouveau faire de zolies photos, sauf que... sauf que...

au bout d'un moment, avant de payer, je remarque un nouveau problème, inexistant jusqu'alors : que les photos soient prises en 2M de pixels, 4, 6 ou 12, chaque photo prend la même place sur l'appareil, soit la taille maximale. Ce n'est pas catastrophique, mais ça remplit l'appareil beaucoup plus vite et ça nous empêche donc de prendre beaucoup de photos. Nous le faisons remarquer à la vendeuse, qui semble interdite. Elle vérifie, essaie sur un autre appareil, et il devient vite évident que c'est juste le nôtre qui foire, et que c'est de leur faute. Le temps passe, elle semble réagir au ralenti...

Davy, de son côté, continue à utiliser chaque Cambodgien croisé pour apprendre le khmer, et divertit l'attention des autres employés du magasin en perfectionnant son accent.

La vendeuse appelle le sous-traitant qui lui a réparé l'appareil. On comprendra plus tard que celui-ci l'envoie se faire foutre, sur le thème du "ah tu n'avais qu'à remarquer que je l'avais mal réparé, c'est ta faute, si tu veux que je le répare il faudra repayer". Du coup, la vendeuse, assez emmerdée, se mure dans un silence de plus en plus profond à mesure que nous nous impatientons. Pire, elle commence à faire de la mauvaise foi :

- but you can take pictures ! so it's working ! so you pay!
- no it is not working ! you created another problem

Le débat est sans fin, et l'intervention d'un autre vendeur, qui lui sera carrément de mauvaise foi, finira de nous faire péter les plombs. Lui est prêt à nous sortir les arguments les plus absurdes : le problème était sûrement présent avant qu'on leur donne l'appareil, c'était à nous de le signaler. Nous nous indignons, car tout le monde impliqué sait que c'est carrément faux, y compris et surtout la vendeuse, qui fait semblant de regarder ailleurs pour conserver sa dignité.

Le type répète encore et encore que c'est notre faute, quand ce n'est pas la fille qui nous dit "ah mais vous pouvez prendre des photos, donc c'est réparé". Une demi-heure a déjà passé, et ils ne semblent toujours pas comprendre qu'il y a un problème (enfin, ils le savent, mais comme ils ont déjà payé le sous-traitant, ils sont coincés, et font semblant d'être idiots). Je leur sors un argument qui détend un poil l'atmosphère et fera rire tout le monde : "imaginez que je suis docteur. Vous vous cassez le bras droit, et vous venez me voir. Je vous répare le bras droit, mais prend un marteau et vous casse le bras gauche, est-ce que vous êtes content ?"

L'atmosphère se détend 3 secondes, puis se retend. Il y a des silences qui durent des minutes entières. Finalement, Aglaé décide de rompre la Règle d'Or de l'Asie du Sud-Est, qui est de toujours garder son calme, afin de ne pas faire perdre la face à tout le monde. Elle se met à pousser des hurlements incroyables, qui me font presque sursauter. L'origine de son énervement est surtout due au fait que ces Cambodgiens n'ont aucun sens du commerce : le problème qu'ils avaient créé était effectivement moins grave que le problème d'origine, et au lieu de proposer par exemple la réparation à moitié prix, ils restent complètement bloqués.

Les cris d'Aglaé bloquent encore plus la vendeuse, qui nous fait signe de nous taire, excédée. Elle déchire la facture, je range l'appareil dans notre sac, je fais mine de partir, ils s'en foutent, ne proposent aucune solution, nous partons.

Nous sommes littéralement anéantis, d'énervement, de fatigue, de maladie et de honte, mais il n'y avait aucune autre solution possible. Davy, bien décidé à détendre l'atmosphère, nous annonce qu'il ne veut plus traîner avec nous, persuadé qu'un contrat a été passé sur notre tête, et que nous allons tous trois mourir d'une balle dans la nuque. Ca ne fait pas rire Aglaé.

En réalité, la honte sera de courte durée (une semaine), car nous nous sommes rendus compte bien après coup que le problème était plus grave qu'on ne le croyait, et qu'il nous était devenu impossible de faire de la place sur notre carte en effaçant des photos. On a bien fait de pas payer, ah !

Strangers in the night
Nous échouons un peu démoralisés dans un super marché de nuit. Des bourgeois, des jeunes à franges, des familles, des touristes : toute la société de PP se presse autour de gigantesques barbecues installés en pleine rue. On peut s'asseoir sur des nattes par terre et grignoter des nouilles aux légumes et des brochettes, et surtout, l'occasion nous est enfin donnée d'avoir l'impression de se baigner parmi des Cambodgiens. Davy aussi semble connaître ça pour la première fois, et il reste fasciné.

L'ambiance est à nouveau pourrie par l'ambivalence des marchands cambodgiens. Pour faire simple à partir d'une histoire assez compliquée et très énervante, nous nous rendons compte au moment de payer nos brochettes qu'on nous demande trois fois plus que Davy pour tout ce qu'on mange. On a beau montrer, expliquer que ce n'est pas normal que les Cambodgiens et les touristes ne paient pas la même chose, on tombe toujours sur un serveur borné qui nous dit que ce n'est pas lui, qu'il ne sait pas, et que ce n'est pas sa faute.

Nous sommes arrivés depuis trois jours au Cambodge, et les Cambodgiens nous insupportent déjà au plus haut point. Presque comme les Népalais avant eux, les commerçants sont bornés, ils n'ont aucun sens du commerce, ne sourient que pour vous appater, et sont d'une honnêteté douteuse. Nous n'avons certes pas eu de chance, et la maladie d'Aglaé n'arrange rien, mais cette dernière n'a qu'une envie : quitter la ville au plus vite, quitte à aller voir un médecin à Siem Reap, notre prochaine destination, plutôt que de rester un jour de plus dans cette ville inhospitaliere.

Le soir nous disons donc au revoir à Davy, aux innombrables moustiques de notre salle de bain, et à une ville à l'ambiance très estivale, mais qui, entre les "salons de massages/prostituées" omniprésents et le sentiment d'arnaque permanente, ne nous a jamais fait sentir très bien accueillis. Aglaé, heureusement, semble aller légèrement mieux.

J'aurais peut-être aimé rester un ou deux jours de plus pour apprendre à domestiquer cette ville aux attractions touristiques pourtant peu nombreuses, mais la maladie et les nouvelles choses à voir nous ont empêché de nous attarder.

Mille mercis à Davy, sans qui la visite de Phnom Penh aurait été franchement horrible !

Phnom Peine (jour 2)

30 janvier

Le lendemain de sa poussée de fièvre, Aglaé ne fait pas la maligne. Nous retrouvons pourtant Davy pour aller visiter le tristement célèbre Musée Tuol Sleng, dit musée du Génocide, sis dans un ancien lycée de PP, qui pendant les 3 années du pouvoir Khmer Rouge fut reconverti en centre de détention et de torture, avant extermination dans les charniers. Ce centre était appelé le S-21, nom qui évoquera quelque chose à ceux qui ont vu le film de Rithy Panh.

La visite idéale, donc, pour bien commencer la journée. Devant le musée, pour bien nous mettre dans l'ambiance, une petite foule d'estropiés et de boiteux fait la manche.

La visite de ce "musée" est particulièrement intense et, je dois le dire, très belle. J'ai du mal à m'exprimer sur le sujet, mais le contraste entre ces murs d'école en béton, qui ressemblent à n'importe lesquels des murs d'école du monde, ce petit jardin où poussent des palmiers, ce cocon de paix dans lequel semble baigner, avec la chaleur, ce lieu, opposé aux atrocités que la muséographie nous apprend, est plus que troublante - elle est nécessaire.

Nécessité sans fin : alors qu'on pourrait croire que ce génocide n'est pas de notre ressort, qu'il est une affaire entre les Cambodgiens et les Cambodgiens et, à la limite, les Vietnamiens qui sont venus ensuite libérer le pays des Khmers Rouges, en réalité une lecture attentive de l'histoire du pays et des textes du musée nous apprend qu'une responsabilité immense incombe aux pays occidentaux, qui ont mis des années avant d'enfin condamner les Khmers Rouges. Pour info, après le génocide, alors que tout le monde savait de quoi étaient responsables les Khmers Rouges (liquidation d'un quart de la population, en gros), les Anglais ont appris aux derniers résistants khmers à poser des mines (qui tuent et mutilent encore tous les jours au Cambodge), et l'ONU a continué à donner un siège aux Khmers Rouges aux Nations Unies, considérant que ces rebelles représentaient encore le pays, et pas ces salauds de Vietnamiens...

Nécessité sans fin, je disais : là où le génocide des nazis contre les Juifs suivait une logique insensée et injuste, elle n'en restait pas moins logique, accessible à l'esprit : il aurait semblé inconcevable que Hitler et Cie tuent tous les Allemands. Ici, nous sommes dans le fond du fond de l'absurdité humaine, puisque les Khmers Rouges, au nom d'une idée (le communisme appliqué a la lettre pour créer une société nouvelle), ont absolument tout détruit : hopitaux, écoles, banques, médecins, gens cultivés, Vietnamiens ou parlant viet, prof ou presque, moines, temples, paysans, paysannerie, tout a été détruit. Ils ont eux-même baptisé le début de leur régime "année zéro". Dès le début, le parti même des Khmers Rouges a subi d'incessantes purges, et il était presque plus dangereux d'être Khmer Rouge que simple paysan. Les bourreaux et tortionnaires du S-21, qui avaient entre 15 et 20 ans, finissaient généralement par être des prisonniers du même centre. Et de ce centre, qui a vu passer des dizaines de milliers de prisonniers, seuls 7 ont survécu.

J'arrête là les informations scolastiques, que vous pouvez trouver par vous-mêmes, et vous urge à mieux vous informer sur ce truc qui jusqu'ici nous touchait sans nous toucher.

La "réussite" si l'on peut dire de ce musée, c'est d'avoir réussi à donner une identité aux victimes. Là où les seules photos que nous avons des prisionniers des camps de concentration nous montrent des êtres privés de toute humanité, des monceaux de cadavres, des numéros sur des crânes chauves et émaciés, bref, des êtres sans visage avec qui il est difficile de s'identifier, le musée du S-21 présente des photos de centaines de victimes, avant incarcération. Collection immense de visages, aux traits cambodgiens, chinois, viets, parfois des visages d'handicapés mentaux, de débiles, souvent des enfants, des bébés parfois, autant d'hommes que de femmes. Et face à ces visages, dont pas un ne ressemble à un autre, rien que le vide. Quelques rares photos de corps brûlés, qui ressemblent à peine à des corps, et que de toute façon Aglaé et moi n'avons pas voulu regarder. Sinon, rien que des visages, et l'absence du corps.

Mais...

Une autre chose était difficile à supporter, sans être du ressort des Khmers Rouges par contre : la plupart des touristes, assez nombreux, qui visitaient le centre en même temps que nous, ne semblaient pas avoir compris qu'ils n'étaient pas en train de visiter un temple, ou un jardin zoologique. Il fallait voir certains gros Américains ventrus visiter l'ancienne école en conquérants, sans avoir l'air choqué, gêné, mitraillant chaque parcelle du musée comme s'il s'était agi d'un beau paysage ou d'un objet d'art, pour comprendre la détresse de Davy.

Ce que ne semblait pas avoir vu Davy, par contre, c'étaient ces touristes qui entraient comme on rentre dans les toilettes d'une gare, et qui ressortaient des salles, le visage émacié, les larmes aux yeux. J'ai eu beaucoup de mal à retenir mes larmes, Aglaé n'a pas pu.

Puis, la chaleur aidant à ne pas se sentir très bien, voilà qu'Aglaé se précipite vers les toilettes, et revient l'air désespéré : elle a vomi. Même si le musée n'y est pour rien, et qu'elle avait commencé à montrer des signes de faiblesse la veille, je trouve le geste assez classieux, ce que ne manquera pas de remarquer Davy : il n'y avait pas de meilleur endroit pour expulser son petit-déjeuner que le Musée du S-21 !

Calvaire pour Aglaé

La petite mistinguette n'a donc pas fini la visite du musée. Elle attendra dans l'ombre que j'ai fini, puis nous nous dirigeons vers un restaurant, afin qu'elle reprenne des forces. Aglaé va mieux, mais la visite du Palais Royal, juste après, ne se fera pas sans douleur.

Le Palais Royal de Phnom Penh est en effet un complexe assez grand, constitué d'une dizaine de bâtiments, et notamment de la fameuse Pagode d'Argent, dont le sol est constitué de 4000 dalles d'argent, et qui contient un splendide Bouddha en or, et un plus petit Bouddha en éméraude. Vraiment très belle visite, sauf qu'Aglaé tient à peine debout et qu'il fait une chaleur à faire fondre le fer. La visite sera donc très longue, et je doute qu'Aglaé en ait tout à fait profité.

Nous passons enfin quelques longues minutes rafraîchissantes dans le jardin/piscine d'un hôtel où a séjourné Davy quelques mois auparavant. Café glacé, ambiance calme et verdoyante. Nous reprenons des forces et le sourire revient.

Ambiance de rue
Davy devant dîner en famille, nous prenons un dîner seul, loin du quartier touristique cette fois, où nous n'avons pas arrêté de manger, et qui est peut-être responsable de la maladie d'Aglaé.

Nous nous retrouvons donc dans un petit boui-boui près de notre pension. Miracle, ils ont une sorte de carte en anglais, sans qu'on sache s'il ne s'agit pas d'une carte avec des prix pour les occidentaux. Mais les plats sont absolument délicieux, et l'ambiance est délirant : le resto installé en pleine rue reçoit un déluge de sons et de musiques provenant de deux télévisions différentes. Nous pouvons même suivre la Star Ac khmère, qui n'est pas plus inoubliable que la nôtre. Les serveurs ont l'air ravis de voir des Occidentaux, dans une ville pourtant absolument bourrée d'expatriés.

C'est là justement un peu le problème de Phnom Penh : il nous aura été très difficile de croiser des Cambodgiens de la ville, et d'avoir l'impression d'y habiter avec eux. Les Blancs sont partout, entre les expats et les touristes, les Cambodgiens prennent sans arrêt des moto-dops, les bus n'existent pas, et personne ne marche jamais dans la rue (principalement à cause de la chaleur). On a donc l'impression d'être sans cesse séparés des gens du coin par une vitre, comme s'il existait des couloirs pour locaux et des couloirs pour occidentaux.

Le soir, la fièvre d'Aglaé est revenue de plus belle. Je la presse d'aller chez le médecin, mais elle me jure que ça va aller, etc.

En réalité, le lendemain a été peut-être encore plus catastrophique.