23 avril
Certaines personnes ont de la chance : après trois jours de temps fabuleux à Pékin, nous prenons le train pour Chengde le jour où il pleut.
Pour la première fois, nous prenons la 4e classe d'un train chinois, aussi appelée "sièges durs". Ce n'est pas l'Inde, mais nous sommes quand même un peu entassés. En face de nous, une femme à l'air sévère a beau savoir parler anglais, elle ne nous adresse pas la parole. Sa voisine, une petite vieille à l'air doux, passera le trajet à tripoter son chapelet et à remuer des lèvres pour une prière silencieuse.
Un paquet de gens sont debouts, ce que je ne comprends pas trop vu que les tickets donnent des places assises, et qu'il y a un contrôle strict des tickets pour monter dans les trains. Nous n'avons pas eu le temps d'acheter à manger, et nous passons trois heures difficiles comprimés dans ce train.
Lorsque nous arrivons à Chengde, ancienne résidence d'été des empereurs, choisie pour la stabilité de son temps et sa fraîcheur, nous sommes un peu douchés : il fait gris, il pleut, il fait froid. Mais nous avons de l'énergie, et plutôt que de prendre un taxi, nous décidons de rejoindre notre hôtel à pied.
C'était une idée un peu idiote, dans la mesure où le plan que nous avons à notre disposition est totalement faux. Pourquoi ? Parce que la Chine est un pays qui va trop vite pour être enregistré par le moindre guide de voyage. Le nôtre n'avait que deux ans, et pourtant la ville n'avait plus rien à voir. Nous avons essayé de nous repérer avec une voie ferré, qui avait été arrachée. De nombreuses rues avaient disparu, ou avaient apparu. Les restaurants avaient été remplacé par des chantiers. La Chine va vraiment trop vite, et ce qui n'était qu'une petite ville il y a peu commençait déjà à se transformer en grosse ville sans âme !
Welcome to the hotel China
Nous finissons par trouver notre hôtel. Depuis Pékin, nous avions essayé de l'appeler une douzaine de fois pour réserver une chambre, car il s'agissait apparemment du seul hôtel avec des prix raisonnables. Mais à chaque fois, une voix répondait en chinois, entendait notre anglais, puis nous raccrochait au nez.
A notre entrée, nous sommes frappés : sur un panneau les chambres valent 5 fois plus que ce que nous voulons. Nous demandons quand même les prix, et nous apercevons que la coutume locale est la suivante : les prix affichés sont une espèce de blague, et tout le monde a un peu oublié leur existence. Du coup on nous donne des prix beaucoup plus raisonnables, mais qui ne souffrent pas la moindre négociation. Spécial !
Nous optons d'abord pour une nuit en dortoirs. Il s'agit de chambres sommaires avec 4 lits, et heureusement personne ne nous accompagnera, car la chambre est vraiment minuscule. D'immenses baies vitrées donnent sur de gros spots qui illuminent l'immeuble : impossible d'avoir un semblant d'obscurité pour dormir. Ces baies sont particulièrement fines, et le vacarme à l'extérieur semble aussi puissant à l'intérieur (voire plus, par un curieux phénomène accoustique).
Mais le pire est à l'extérieur de la chambre : les toilettes à la turque, très chinoises, sont immondes. Une puanteur rare en sort. Quand je demande où sont les douches à l'espèce d'hôtesse qui est responsable de chaque étage, et qui a les clés de chaque chambre, elle semble réfléchir un long instant. Bon, c'est vrai qu'au début, lorsque je lui ai mimé la douche, elle croyait que je cherchais un sèche-cheveux, mais quand bien même, il semblait que ma question l'étonnait. Elle me demande de la suivre jusqu'au bout du couloir, sort une clé (il faut donc sa permission pour prendre une douche), ouvre une porte. Une vague odeur d'humidité sort d'une pièce obscure. L'interrupteur pour allumer la lumière ne fonctionne pas, je dois la suivre à l'étage inférieur.
Je découvre une grande salle de douche commune, avec trois trous percés dans des tuyaux. Aucun rideau pour séparer quoi que ce soit, si bien que si quelqu'un débarque, il me voit tout nu, et je le verrai tout nu. Nulle part pour accrocher ses affaires, et un sol sale et trempé, sur lequel on voit des tas de cheveux, de la poussière mouillée et des morceaux de savon.
Après une bonne insomnie, décision est prise : demain on prend une vraie chambre avec salle de bain !
Nous faisons ici face à une ville véritablement chinoise : peu de touristes occidentaux se rendent à Chengde, trop fascinés par Pékin. Cette ville n'attire donc que des touristes du pays, et uniquement le week-end. L'infrastructure hôtelière n'est donc pas du tout adaptée à des routards, personne ne parle anglais, il n'y a aucun véritable bar : c'est notre première expérience authentiquement chinoise !
Fondus de Chinois
Nous rentrons dans le premier restaurant qu'on croise à la sortie de l'hôtel. La pluie battante ne nous pousse pas à tergiverser. Il s'agit d'une petite cantine un peu chic, avec personnel aux habits assortis. Nous voyons d'autres gens qui plongent de la viande dans un gros bouillon chaud : enfin une occasion de goûter la huoguo, la fondue chinoise !
Commander est une épreuve du feu. Une petite serveuse intimidée est ravie de nous voir, et peut expérimenter les quelques mots qu'elle connait en anglais : patate, tomate, viande, eau, sauce, obligatoire. Heureusement, car commander une fondue chinoise est très compliqué : il faut choisir son bouillon, des sauces, de la viande, des légumes, des condiments, etc. Nous sommes perdus dans les prix, les choses à commander, sans savoir si elle nous pousse à la consommation ou veut au contraire nous délivrer une bonne expérience culinaire !
Le bouillon arrive. La petite serveuse reste à notre côté, et nous montre comment manger la fondue. En fait, elle ne nous montre pas : elle fait tout à notre place. D'une gentillesse rare, au lieu de nous laisser nous dépatouiller après nous avoir montré les grands principes, elle restera tout au long du repas notre serviteur personnel, nous resservant à chaque fois que notre assiette est vide, plongeant dans le bouillon les viandes, la laitue et les légumes avec une dextérité et un sens du rythme incroyables.
Difficile d'oublier le sourire de cette petite serveuse lorsque nous l'inondions de "merci", mots que s'échangent si rarement les gens du coin...
Derniers plans, une invitation
Il y a 7 ans
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