mercredi 6 mai 2009

De la ponctualite des trains japonais

2 avril



Faire le tour de Tokyo pour aller chercher deux visas mongols au milieu d'un quartier residentiel a la noix, c'est deja penible. Mais le faire alors que vous avez un train qui part en début d'après-midi signifie que vous allez participer à une course en transports en commun. C'est-à-dire que ce sera psychologiquement une torture. Laissant Aglaé à l'hôtel (toujours le blog à rédiger), je m'occupe de ces formalités. Oh la joie de ressortir de l'ambassade de Mongolie avec le tout dernier visa du voyage !

Lorsque je reviens, j'ai beau etre affamé, il faut repartir en 4e vitesse, dans l'autre sens, afin de chopper notre train pour Kyoto. C'est la première expérience de Shinkansen d'Aglaé, elle en est toute excitée d'avance, mais encore faut-il être assurés que nous l'attraperons, ce satané train !

Au fond, un Français n'est jamais totalement stressé lorsqu'il est en retard pour son train : la probabilité que le train parte sacrément en retard est toujours là, tapie derrière l'hypothèse d'une grève éclair, d'un "incident de signalisation", voire de l'affreux "incident de voyageur". Au Japon, ce rêve est une chimère : nous voyageons au pays des trains qui partent à l'heure. Le slogan de JR, la SNCF nippone : vous pouvez régler vos montres sur l'arrivée du train en gare. Et le plus fou, c'est que ce slogan est vrai, le train part à la seconde près.

Aglaé ne croit pas une seconde à mon espoir fou d'attraper le train quand même : "c'est pas grave, on aura le prochain, Charly". Quant à moi j'y crois dur comme fer, avec l'assurance stupide de celui qui ne veut pas avoir tort (encore moins face à une femme ah ah ah). Assurance stupide ou pas, nous courons dans les couloirs de la gare, tournons sur nous-mêmes, guettons les panneaux de signalisation, et parvenons "in extremis" à nous ruer dans ce Shinkansen (TGV japonais) dont les machoires de fer se referment sur nos ombres.

De la psychorigidité des hôtesses japonaises
Nous sommes exténués, en sueur, au bord de la crise d'hypoglycémie, mais nous sommes dans notre foutu train. Cerise sur le gateau : j'avais raison et Aglaé avait tort. Les Shinkansen sont une merveille : magnifiques à l'extérieur, luxueux à l'intérieur, rapides comme des flèches, ponctuels et surtout très fréquents (sur la ligne principale, un départ toutes les 5 minutes en moyenne, à comparer avec l'unique départ par heure du TGV Paris-Lyon, dont nous sommes si fiers).

Bombant le torse, je propose d'aller lui chercher à manger. Le train roule déjà dans l'infinie banlieue de Tokyo, mais je ne trouve d'abord pas l'hôtesse qui, habituellement dans les trains japonais, pousse un énorme caddie rempli de victuailles salées ou chocolatées.

Je reviens, et m'aperçois qu'Aglaé, à mon image, est au bord de s'évanouir de faim. Je repart dans une quête de l'hôtesse, la trouve arrivant dans le wagon d'à côté. Je m'approche d'elle, souriant, sort mon porte-monnaie. Non. Pas possible. Il faut attendre que je vienne à votre niveau, dans votre wagon, devant votre siège. Refus de vente : nous découvrons un des traits les plus compliqués du caractères japonais. Le manque de souplesse. Si les Japonais dans leurs relations sociales sont prêts à tout quitter pour aider l'autre, dès qu'ils travaillent ils trouvent un goût de la chose bien faite qui les fait se fermer à toute alternative. On a donc un service parfait, mais qui sera toujours celui prévu.

Nous finirons par pouvoir lui acheter les denrées nécessaires à notre survie, mais après être passé au bord de la famine, à quelques mètres de son chariot...

Pour ceux qui n'en ont jamais entendu parler, il y a d'ailleurs quelque chose de très drôle dans les trains japonais, qu'on ne remarque pas forcément si on n'y fait pas attention. Quand un membre de la compagnie (contrôleur, femme au chariot, conducteur) traverse le wagon et atteint le vasistas qui le mènera au wagon suivant, il se bloque, se retourne, et fait une longue courbette aux honorables passagers. Qu'importe le nombre de passagers, et surtout qu'importe qu'ils le regardent ou pas (personne n'y fait attention de manière générale). Une Française rencontrée plus tard dans le voyage nous racontait qu'une fois elle était seule dans un wagon, que le contrôleur avait fait sa courbette habituelle, qu'elle avait hurlé de rire : le type s'était aussi mis à rire.

Complètement Fouji
Il parait que certains Japonais font le trajet Tokyo-Kyoto des centaines de fois, et qu'ils ne voient jamais le Mont Fuji, qui est pourtant théoriquement très visible depuis la ligne de Shinkansen. La faute à la brume et aux nuages, qui coiffent souvent l'honorée montagne si chère aux coeurs nippons.

Et nous, pour notre premier trajet, que ne voyons-nous pas l'incroyable Mont Fuji, seul et majestueux, trônant au milieu de sa morne plaine, promenant son chapeau de neiges éternelles avec fierté et orgueil ! Oh la chance, oh la joie. Les photos suivront, ne vous inquiétez pas.

Et quand à notre arrivée à Kyoto, ce sera pour le message suivant.

Le KFC de Tokyo

1er avril

Une fois rentres a Tokyo, les consequences de notre desorganisation de la derniere fois se font encore sentir, puisqu'il faut reserver un hotel pour le soir meme. Par miracle, il reste une derniere chambre dans l'auberge de jeunesse qui nous avait tant plus quelques jours auparavant. Ce qui est moins miraculeux, c'est que je ne comprends pas bien le prix qu'on me donne au telephone, prix qui est 3 fois plus grand que celui que nous avions paye la derniere fois, "parce qu'il ne reste plus qu'une chambre triple".

Quelques negociations avec le patron qui se trouve etre un francais, et nous nous arrangeons. Il se fait vite tard, et nous devons nous nourrir. Le probleme c'est qu'il se met a pleuvoir tres fort dehors, et qu'il n'y a pas beaucoup de restaurants dans le quartier. L'autre probleme, c'est qu'Aglae, assez fatiguee, nous fait un petit caprice fort comprehensible : apres des mois de restaurants chinois et apres 5 jours de restaurants japonais, elle a juste envie d'un McDonald's avec de rassurants nuggets.

Sauf que le McDonalds est tres loin, qu'il pleut, que la pluie se transforme en orage, que la foudre se rapproche, et que moi j'ai tres envie de manger japonais. Mini-dispute assez absurde :
"Mais va manger ton japonais, je t'accompagne, puis on ira au McDo !
- Ah ben bonjour l'ambiance, hein, chacun a regarder l'autre bouffer !
- Mais j'ai pas envie de manger japonais, Charly, c'est tres bon mais j'en peux plus des nouveaux plats !
- Mais le McDo berk on en a pris a Hong-Kong il y a a peine une semaine !

Je vous laisse imaginer le niveau intellectuel de la brouille, motive pour ma part par des considerations ethiques assez viles. Nous finissons par nous decider a manger l'un apres l'autre dans un resto japonais, puis au Donald's, si possible avant de mourir foudroyes. Je mange de delicieux beignets de gambas dans un succulent bouillon de nouilles, mais lorsque nous nous retrouvons devant le McDonalds, catastrophe ! Au Japon, les McDo ferment a 20h30 ! Et ils en sont fiers en plus, ils mettent un panneau : nous on ferme a 20h30 !

Aglae s'embarque donc dans un processus tres feminin : la culpabilite. Elle se persuade a la vitesse de l'eclair que c'est sa faute, elle n'avait qu'a pas faire de caprices. Et lorsque nous echouons dans un KFC (la seule chose ouverte pas loin), ces restos de poulet pane frit, elle decide de prendre le plat le plus petit et le moins cher pour expier sa faute imaginaire.

Moi : Arrete Aglae c'est absurde, nourris-toi, quoi !
Aglae : non, c'est bon, j'ai pas faim ! (les connaisseurs reconnaitront une replique bien feminine)

Le moine sauveur des estomacs vides
Alors que nous sommes un peu deprimes par la tournure de la soiree, j'entends un souffle rauque, et me tourne vers l'escalier - car nous mangeons a l'etage du fast-food. C'est un homme de la soixantaine, peut-etre moins, qui est en train de s'echiner a faire monter a une enorme valise les nombreuses marches qui separent les deux etages. L'homme est un veritable comedien : il nous regarde avec un petit sourire miserable, il fait des mines, essuie de son front une sueur imaginaire. Il est a moitie en train d'appeler a l'aide.

Je me leve donc et porte sa valise (vraiment lourde) pour les 6 derniers marches. Puis, d'autorite, je l'amene jusqu'a la place qu'il s'est choisie. L'homme, duquel emane une puissante odeur d'alcool, fait des mimes pour faire rire Aglae pendant que je porte sa valise, puis se confond en remerciements. Nous regagnons notre place, mais deux minutes plus tard, l'homme revient vers nous. Il nous parle en japonais, fait signe vers notre plateau degarni, vers lui, vers le comptoir de l'etage en-dessous. Au debut nous ne comprenons rien, puis je me demande s'il ne veut pas nous offrir quelque chose, d'autant qu'il fait les signes de manger et de boire.

Enfin, lasse de notre manque de comprehension de la langue nippone, il me prend par le bras et me fait descendre les degres qui menent au comptoir du fast-food. La, il explique au serveur ce qu'il veut, me fait des mines vers les photos des menus, et exige de moi une decision ferme. Je commence a comprendre, mais suis evidemment trop gene : pourquoi volerais-je l'argent d'un miserable ivre mort ? Excede de ma gene, le vieil homme demande au serveur de choisir pour moi un menu avec deux boissons, deux frites et une tonne de poulet.

Nous remontons. A savoir d'ailleurs : les Japonais ont completement biaise le principe du fast-food, puisque les serveurs vous amenent vos plateaux a votre table, et les debarrassent quand vous avez fini. Comme un restaurant, oui... Nous remercions dix fois, quinze fois, et acceptons l'invitation du monsieur de le rejoindre a sa table. Il ne parle toujours pas un mot d'anglais.

S'ensuivront des moments incroyables, qu'on peut difficilement trouver hors du Japon : des contorsions et des dessins pour expliquer au monsieur qui nous sommes, la meme chose de sa part pour nous faire comprendre qu'il est un moine bouddhiste (enfin nous n'en serons jamais surs), lui qui montre ses photos de voyage a la femme qui fait le menage dans le KFC, elle qui ecoute patiemment et gentiment parce qu'on ne froisse JAMAIS un aine, meme et surtout quand il est ivre, une dame d'age mur, tres elegante meme avec un poulet tout gras dans les mains, qui nous regardait avec un rire de connivence, le moine ivre qui ne mange rien et qui nous donne a finir ses plats (en plus de l'enorme truc qu'il nous a commande)...

A la fin, il ordonne aux serveurs de nous faire un paquet avec les morceaux que, le ventre gonfle a craquer, nous n'avons pas pu finir. Puis il sort une cigarette, nous demande si nous fumons. Devant notre refus, il refuse que nous soyons incommodes par sa fumee, et nous congedie assez brutalement.

Nous nous retrouvons dans la rue, hebetes, un sachet a la main rempli de morceaux de poulet frit tout froid, une serviette de table dans l'autre, gribouillee d'informations sur le moine ivre -informations en japonais que nous n'avons toujours pas pu faire decrypter. Il ne pleut plus, et Aglae ne regrette plus son caprice.

Nous venons de vivre une des rencontres les plus extraordinaires de notre voyage, a egalite avec la discussion avec Maharadjah Shiva, il y a de ca 3 mois.

Nikko: nudite et lieux sacres






31 mars - 1er avril

La journee commence par un ptit-dej pantagruelique servi par une mamie tout sourire. Elle nous donne l'impression d'etre une vraie grand-mere poule lorsqu'elle nous met en garde contre le froid et la nuit qui tombe vite.

Beaute froide
Nous sautons dans un bus qui, au bout d'une route aux lacets impressionnants, nous depose pres d'un grand lac entoure de montagnes enneigees. Nous allons voir une impressionnante cascade puis nous baladons sur les rives du lac. Il reste encore un peu de neige, tous les restaurants et hotels sont fermes, nous sommes seuls. Une multitude de pedalos en forme de cygnes git sur la berge, en attente des Tokyoites avides d'air frais qui viendront en masse cet ete. Cette atmosphere hors-saison donne au lieu un air nostalgique.

Le froid n'est pas trop vif et la balade tres agreable. Nous passons par un petit temple en bois tout aussi solitaire. Cette longue marche me rappelle un peu "mon" lac par une belle journne d'hiver...

Nous finissons par atteindre une riviere qui se jette dans le lac. En la remontant, nous tombons sur une suite de cascades chantonnantes. Nous sommes affames et decouvrons a ravissement un petit resto cosy donnant sur une des cascades. Un peu rechauffes, nous repartons en sens inverse. Les montagnes au formes etranges se refletent dans le lac, des rayons de soleil percent les nuages et viennent gentiment rechauffer nos nez tous froids.

Nous finissons par revenir a la realite et jetons un oeil aux horaires de bus : nous faisons la fin de la balade en courant. Peine perdue, nous loupons notre bus. Et le prochain est dans 50 minutes !

Au bord de la congelation, nous nous refugions dans le seul resto ouvert et voulons commander un cafe. Le Monsieur ne parle pas un mot d'anglais ; Charly lui montre les signes japonais marques sur le panneau d'une grande marque de cafe... et il nous apporte 5mn plus tard des gyozas. Ce sont de petits raviolis a la viande, tres parfumes, delicieux, mais par pour le gouter! Nous finissons par reussir a lui faire comprendre notre meprise et avalons enfin le precieux liquide rechauffant.

Chaud-froid
Le bus suivant finit par arriver. Avant de retourner a Nikko, nous sautons en route. Apres un peu de marche sur une route deserte, nous atteignons notre second but de la journee: un grand onsen. Nous vous avions deja explique que les grands bains communs d'eau chaude etaient la regle dans l'hotelerie japonaise. Il existe donc bien sur de grands bains publics a l'eau thermale un peu partout au Japon, surtout dans les montagnes. Pays volcanique oblige.

Charly part du cote hommes, moi du cote femmes. Nudite oui, mixite non ! Il y a beaucoup de monde et je suis la seule non-japonaise, ce qui est un peu intimidant. Pourtant les gens ne se regardent pas, pour eux c'est tout naturel. L'eau brulante fait un bien fou apres cette longue marche dans le froid. J'en ai la tete qui tourne. Il y a meme un bain tout fumant dehors, a l'air libre. On peut donc s'allonger sur de gros cailloux au bord du bain, en mode sirene, et rester ainsi a l'air libre pendant 15mn sans avoir froid, tant le corps a emmagasine de chaleur. Les corps nus fument, cela fait une etrange impression.

Un peu etourdie, je sors et retrouve Charly. Il a recroise l'Espagnol de notre auberge de jeunesse dans le onsen : c'est quand meme un peu genant de discuter a poil avec quelqu'un qu'on connait a peine ! Malgre cet aspect un peu intimidant, nous pensons tous deux que cette tradition des onsens est vraiment agreable et relaxante.

La route du retour est encore plus tortueuse que celle de l'aller. La montagne est tellement pentue a certains endroits qu'il n'y a pas une route, mais deux routes, l'une pour les vehicules qui montent, l'autre pour ceux qui descendent. Nous manquons de nous sentir mal tellement ca tourne. Heureusement, de savoureuses brochettes viennent vite remplir nos estomacs creux! Rien a voir avec les brochettes des restos japonais de Paris...


Merveilles dans la foret

Le lendemain le ciel est gris. La petite mamie de l'auberge de jeunesse nous previent qu'il va pleuvoir.

Charly avait adore les temples de Nikko a son precedent passage, il m'en avait beaucoup parle et j'avais peur d'etre decue. Point du tout, c'est l'emerveillement!

Un ensemble de grands temples tout en bois est niche au milieu d'une foret de hauts cedres, tres majestueuse. Une lumiere un peu poussiereuse filtre a travers les arbres et donne au lieu un cote solennel et mysterieux. Les temples, portes, tours du tambour et de la cloche sont d'une grande finesse. Aux plafonds, des dragons tiennent des perles dans leur gueule, des gardiens terrifiants protegent les portes des temples, des bouddhas aux demi-sourires emergent de l'ombre des sanctuaires...

Apres une delicieuse matinee de temple en temple, nous retournons dans le resto a brochettes de la veille. Les murs sont couverts de photos et de petits mots laisses par des voyageurs des 4 coins du monde. Nous realisons soudain que quelqu'un de familier nous regarde nous empiffrer avec delice: c'est la photo de Cecile, une de nos amies de Paris, qui etudie cette annee au Japon !


Bonnets rouges sous la pluie

Malgre une fine bruine, nous allons nous promener le long d'une jolie riviere sacree pour les gens du coin. Le long de la rive on ete posees des centaines de statues de Bouddha en pierre. Certaines sont en parfait etat, d'autre sont usees par le temps, voire completement en ruine. Toutes sont habillees de petits bonnets et de bavoirs rouge vif, couleur tellement eclatante par rapport a la vetuste des statues. Ce sont les gens qui ont perdu un enfant qui viennent habiller ses statues. Nous sommes seuls sur ce chemin pluvieux et la beaute du lieu se melange a un etrange sentiment de tristesse.

Nous finissons par arriver pres d'une centrale electrique et d'une ecluse. Tout semble rouille et abandonne, on se croirait dans le jeu Myst. La pluie devient de plus en plus forte (mamie nous avait prevenu!), nous faisons demi-tour et rentrons, rinces.

Nous sautons dans le train direction Tokyo: adieu le calme d'une nature sacralisee, retour dans le bouillonnement de la megalopole.

Tokyo-Nikko : ambassade paumee, planning rate, temps perdu !

30 mars

Avant de partir de Tokyo, il nous fallait passer par l'ambassade de Mongolie, afin d'obtenir notre tout dernier visa du voyage. Une chance, l'ambassade etait toute proche de notre love-hotel.

Tout le quartier des love-hotels, une fois le jour leve, donne l'impression de subir une grande gueule de bois. Les facades sont tristes, un peu grises. Malheureux.

Quand je dis "toute proche", a propos de l'ambassade, je veux dire qu'elle etait proche a vol d'oiseau. A vol d'un oiseau qui sait ou aller, de surcroit. Le probleme est que trouver une adresse au Japon, hors des tres grandes avenues, releve de la quete d'une vie. Le pays inventeur du go a trouve un jeu encore plus complique en refusant de donner des noms a ses rues.

Manque d'adresse evident
En fait, une adresse japonaise se presentera de la facon suivante : 3-5-7, Kamiya, Shibuya-ku, Tokyo, par exemple. L'endroit que vous cherchez se trouve donc dans le grand district de Shibuya de Tokyo. Il faut chercher le sous-district de Kamiya, lui-meme divise en plusieurs sous-sous-districts, portant chacun des numeros : il faudra donc chercher Kamiya-3, puis le bloc de maisons numero 5, puis faire le tour du bloc jusqu'a trouver la maison portant le numero 7. Tout ca est encore complique par le fait que dans de nombreux quartiers, les numeros de blocs et de maisons ne se suivent pas dans le sens des aiguilles d'une montre, mais par ordre de construction. Et les numeros des blocs et des maisons n'apparaissent pas tout le temps sur les facades...

Meme avec une carte ultra-precise, ce que personne ne possede, trouver une adresse est donc un cauchemar. Les policiers, postiers et tenanciers de magasins sont donc specialement formes pour guider les gens, car bien evidemment meme les Japonais sont completement perdus des qu'ils sortent de leur pate de maison. Etrange complication dans une societe ou tout est toujours fait au plus simple...

Dans notre cas, il nous a donc fallu demander a un caissier de 7-Eleven (equivalent du 5 a 7). Le type, tres sympa, sort un immense livre rapiece, ou chaque page est une carte (en miettes) de bouts du district.

Grace a lui, nous trouvons l'ambassade, nichee au milieu d'un quartier residentiel calme. Les quartiers residentiels calmes, faits de milliers de maisons a 2 etages, composent environ 80 pour 100 de la surface totale de chaque ville japonaise, Tokyo y compris. On se retrouve dans des rues vides, avec pas vraiment de trottoirs mais pas vraiment de circulation non plus, des arbres partout. Fait surface l'impression d'etre en lointaine banlieue, et ce en plein coeur de la plus grande ville du monde. Quelques rares magasins, des restaurants mysterieux aux portes closes, et puis vous prenez une ruelle, et d'un coup vous vous retrouvez dans une avenue gigantesque, avec du bruit, des grands centres commerciaux, etc... Le Japon, ou l'art du contraste dans le contraste dans le contraste.

La Mongolie, un pays hyper organise
Lors de nos recherches, nous avions ete assez surpris de voir que la Mongolie etait un pays completement minable dans ses relations avec les pays etrangers : ambassades rares, souvent en train de fermer ou deja fermees, jamais un site internet, aucun numero pour appeler, etc. Nous avions meme passe une bonne minute a rire devant l'adresse mail de l'ambassade mongole en Chine, hebergee chez Hotmail.

La surprise est donc minime lorsque nous trouvons ladite ambassade a Tokyo, nichee au milieu de petites maisons, un petit truc tout calme. Le monsieur a qui nous donnons nos papiers ne semble pas voir passer grand-monde et ne parle ni anglais, ni japonais, ni rien. Il s'adresse a nous dans quelque chose qui ressemble a du russe, ou du mongol - on ne sait. Une impression generale tres serieuse, donc.

Attends on est quel jour cherie ?
Apres cette formalite bien etrange, depart pour Nikko, petite ville nichee dans la montagne et qui compte parmi les plus beaux temples du Japon. Pendant le trajet en train nous realisons que nous qui croyions etre tres organises avons completement confondu les dates de notre sejour. Cela fait que nous arrivons a Nikko un jour trop tot, et que notre auberge n'est reservee que pour le lendemain soir. Catastrophe !

La ville de Nikko est tellement paumee qu'elle ne s'embarrasse pas de la mode occidentale, mais prefere plutot vivre a la japonaise : lorsque nous descendons du train, il a beau etre 19h30, tout est ferme. On se croirait a 4 heures du matin tant la ville semble assoupie. En y ajoutantune nuit noire et un froid particulierement mordant, nous sommes un peu terrorises a la perspective de dormir dehors a cause d'un melange de pinceaux. Par miracle, l'auberge a laquelle nous telephonons des notre arrivee conserve encore des lits disponibles.

Longue attente dans le froid pour attraper un bus en direction de notre pension (il y en a un toutes les heures). Une fois arrives, nous decouvrons le syndrome du Japonais surpris : la tenanciere assez agee est tres froide envers nous. Elle nous fait sentir qu'elle n'aime pas etre prevenue au dernier moment, et nous nous demandons ce que ca aurait ete si nous n'avions pas appele.

Tres rapidement cependant, a force de sourires, la glace se brise, et lorsque nous arriverons au petit-dejeuner tout decoiffes, le lendemain matin, notre degaine la fera tellement rire qu'elle deviendra d'un coup adorable a notre egard.

Quant a l'auberge, elle est typique a mort : les lits sont caches dans des alcoves de bois, on s'enfonce dans des tunnels creuses sous des metres de couettes, un grand bain a la japonaise nous attend. Nous discutons un moment avec un Espagnol flegmatique, allons manger dans le seul restaurant encore ouvert de la ville (il est 20h30, tous ferment a 20h), et rentrons nous blottir sous les couettes.

Dans tout long voyage il y a des journees un peu perdues...