dimanche 19 avril 2009

Tigre et Dragon

17-18 mars
Les gorges du Saut du Tigre et les montagnes du Dragon de Jade

Lever aux aurores dans un ville encore endormie. C'est assez etrange de voir cette ville d'habitude emplie de touristes bruyants, maintenant vide et silencieuse. Ca pourrait etre super sauf que nos ventres crient famine et que tout est ferme. Nous finissons par apercevoir une lueur au loin et avalons le ptit-dej' local: du lait de soja pour Charly, du porridge de riz pour moi... ca n'a absoulement aucun gout mais ca nous tiendra au ventre pour les prochaines heures.

De bon matin, la barriere de la langue

Nous nous precipitons sur un taxi et realisons alors que nous avons oublie notre precieux guide de conversation chinois : horreur! Comment dire "gare routiere du Sud" en mandarin ? Plusieurs chauffeurs ne comprennent rien a nos gestes et refusent de nous prendre, nous commencons a perdre espoir. Finalement, apres avoir mime puis montre un bus, un chauffeur semble comprendre et accepte la course.

Au bout de quelques temps, nous realisons qu'il se dirige vers la gare routiere du Nord. Nous lui crions: "Bou shi, bou shi!" (non, non), montrons le Sud ; il nous hurle dessus en chinois. Je commence a avoir peur mais finis par realiser qu'en fait il n'est pas du tout enerve et qu'il essaie juste de communiquer avec nous en aboyant. C'est la facon des Chinois. Il finit par comprendre et nous atteignons enfin notre but.


La guichetiere nous vend un billet pour un bus qui part dans 3mn et nous crie de nous depecher. Nous courons a travers la gare, sautons dans le bus : ouf! Nous en sautons tout aussi precipitamment apres deux heures d'un trajet tres beau dans un bus tres lent. Le chauffeur passera d'ailleurs plus de temps a se racler la gorge et a cracher a travers sa fenetre qu'a appuyer sur l'accelerateur.

Nous trouvons sans trop de problemes le debut du chemin de randonnee grace a notre super carte, chemin qui est ensuite super bien fleche. En effet, les guesthouses qui parsement le chemin ont peinturlure les rochers de fleches multicolores et d'indications de distance et de temps. Pas de risque de se perdre!


La montee de la mort, la vue qui tue
Ca monte sec, il me faut un peu de temps pour prendre mon rythme. Nous grimpons a flanc de montagnes, les gorges sont encore invisibles. Des enfants suivent un cours de gymnastique tres militaire dans la cour d'une minuscule ecole, nous croisons des paysans et leurs anes. Nous doublons des touristes chinois charges comme des mulets. Ils avancent aussi vite que des tortues bicentenaires. Comme toujours avec les nouveaux riches chinois, ils ont cru utile de se munir de piolets et d'habits pour haute montagne dernier cri. On dirait qu'il vont s'attaquer au Mont Blanc.

Au bout de 2h nous atteingons la premiere etape, la Naxi guesthouse, et decidons de continuer notre chemin car nous n'avons pas faim (les ptit-dej' chinois caleraient un dragon). Le soleil tape de plus en plus fort et la Gorge commence a se devoiler: en face de nous se dressent les parois verticales et dechiquetees des montagnes du Dragon de Jade. Les sommets sont enneiges (ils atteignent 5000m) et les pentes si raides qu'il n'y a aucune vegetation. Juste des rochers aceres dans tous les tons de gris. Les pentes de la montagne que nous grimpons sont tres raides mais pas encore assez pour que nous puissions apercevoir le fleuve qui coule en contrebas. Car contempler le Yangtse (fleuve Jaune) se merite: il faut d'abord passer l'epreuve des "28 lacets".


Derriere ce surnom se cache une montee qui essoufflera meme Charly (qui faisait le malin jusque la). Je compte consciencieusement les lacets pour me donner du courage mais nous sommes en eau. Petite pause a l'ombre de temps en temps. Arrivee a 28 lacets je leve les yeux et constate qu'il en reste encore d'autres, beaucoup d'autres... ah les traitres, ils m'ont menti!

Arrives en haut, rouges comme des piments, nous voulons enfin contempler la vue. Mais une vieille a privatise le bout de rocher qui surplombe le fleuve, situe des centaines de metres plus bas. Furieux - on l'a quand meme paye de notre souffle cette vue!- nous trouvons un point du vue tout aussi bien 10m plus loin.

Et la c'est l'emerveillement absolu: je n'en crois pas mes yeux. En face, les montagnes d'une hauteur incroyable tombent litteralement a pic dans une puissante riviere, petit filet bleu parseme d'ecume blanche, tres loin sous nos pieds. De notre cote, c'est absolument vertigineux. Des pentes herbeuses verticales font un mur juste sous nos pieds, et quelques bambous casse-cou ont pousse a 90 degres. C'est indescriptible, un des plus beau paysages vus pendant notre voyage.


Nous nous arretons pour manger un peu apres 4h30 de marche. Les gens de la guesthouse-restaurant sont absolument charmants, les toilettes ont la plus belle vue du monde (ouverts sur les sommets enneiges) mais nous decidons de continuer notre route. Le sentier est beaucoup moins raide, il longe le flanc des montagnes. Certains passages sont tres vertigineux, il faut faire attention ou l'on met ses pieds mais... c'est tellement beau! Un vent violent se met a souffler, tentant sans succes de nous pousser dans le precipice. Le bruit qu'il fait en agitant les arbres de lointaines forets et en s'engouffrant entre les rochers est presque effrayant (Charly et moi penserons a la meme seconde a Olympe la lessive des Dieux, pour les connaisseurs).


Soudain, nous apercevons une cascade qui passe au milieu du sentier, deja situe sur une corniche a pic. Nous pensons naivement que nous pourrons passer derriere (comme dans Tintin), mais non, il faut la traverser a gue. Nous mouillons prudement nos pieds et passons de cailloux en cailloux en essayant de ne pas regarder le vide en-dessous. Nous renouvelons l'experience avec un torrent et benisssons les dieux d'etre a la saison seche!

Nous apercevons l'immense gorge, les sommets blancs et les rapides du Yangtse sous des angles toujours differents et je ne peux m'empecher de pousser des cris d'emerveillement tous les 100m. Apres 6h de marche, nos jambes commencent a donner des signaux de fatigue. Mais la nuit est loin et nous decidons de faire la randonnee jusqu'a la fin. La descente se fait dans une belle foret, on se croirait en Europe, ca sent le pin!


A un moment, un petit vieux agile comme un cabri arrive derriere nous, en silence, double les deux hippopotames aux pattes lourdes (nous) et les laisse sur place, en bondissant rapidement de rocher en rocher.

Nous atteignons le village poetiquement nomme "le Jardin des Noisettes" apres 8h de marche, completement ereintes. Nous nous ecroulons sur les fauteuils d'une pension et regardons les montagnes disparaitre dans l'ombre sans avoir la force de faire connaissance avec les autres voyageurs. Nous parvenons a nous trainer jusqu'a un petit resto tibetain ou nous sommes les seuls clients. La nourriture est simple et delicieuse, la cuisine que nous apercevons est en terre battue et sombre : toute la famille s'y tient pelotonnee.


Inutile de preciser que nous nous endormons a la vitesse de la lumiere et nous reveillons avec de belles courbatures.


Au fond, tout au fond...

Le deuxieme jour, nous voulons explorer le fond de la gorge et nous approcher un peu des rapides, deja impressionnants vus d'en haut. Nous nous engageons sur un sentier serpentant a travers quelques rizieres en terrasses. Nous tombons rapidement sur une petite cabane : une jeune fille nous explique qu'il faut payer 10 Yuan par personne pour passer car ce sont les paysans du coin qui entretiennent le chemin. Le parc naturel (dont nous avons deja paye l'entree la vieille) n'entretient que le sentier du haut. Nous payons et passons.


Le sentier est de plus en plus acrobatique, il passe le long d'une falaise qui tombe dans le fleuve 150m plus bas. Les paysans ont installe des petits pontons en bois et ont fait des rampes avec des cables elecriques pour que l'on puisse s'accrocher. Ce n'est donc pas trop dangereux si on est prudent. C'est meme tres amusant dans le style "acro-branche le long d'une falaise".


Nous nous approchons de plus en plus des bouillons blancs du Yangtse, qui font un bruit assourdissant. Les montagnes au-dessus de nous sont ecrasantes, le fleuve d'une puissance folle, c'est impressionnant. Soudain, un autre paysan surgit de nulle part et nous demande encore 10 Yuan pour avoir l'autorisation d'emprunter le bout de sentier qui descend le plus pres du fleuve. Nous lui rions au nez et prenons le chemin qui passe un peu plus haut, un peu agace de cette privatisation des chemins dans un pays soi-disant communiste. Apres 50m, deux autres paysans nous expliquent qu'il faut encore payer 10 Yuan pour pouvoir remonter du fond de la gorge. Nous avons un peu l'impression de se faire racketter mais nous n'allons pas rester ici eternellement !


Commence alors une remontee des plus spectaculaires par un systeme d'echelles surplombant le vide. C'est a couper le souffle et un peu effrayant, car une des echelles fait au moins 20 metres de haut.

Il est maintenant temps de rentrer a Lijiang. Nous trouvons un minibus, que nous partageons avec d'autres randonneurs pour nous ramener au point de depart de notre randonnee. En effet, jusqu'ici la randonnee de 8h avec 28 lacets rendait inaccessible la gorge du Saut du Tigre aux groupes de touristes chinois suivant un guide a drapeau. Pas grave! Les autorites ont construit une route pour permettre aux bus de deverser leurs cargaisons a casquettes sur un point de vue construit en beton.

Invisible (heureusement!) depuis notre sentier qui passait tres haut, cette route dangereuse passe 200m au-dessus de la gorge au prix de virages vertigineux. Et c'est celle-la que nous empruntons pour revenir. Notre minibus cahote dans tous les sens. Certaines parties ne sont pas goudronnees et il y a des traces d'eboulements partout. Ce n'est pas tres rassurant et nous sommes heureux d'arriver!

1 commentaire:

  1. la connaisseuse a bien rit en pensant à Olympe la lessive des dieux !!

    gro bisous les randonneurs !

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