Merci a tout le lecteur qui nous suit assidument et laisse toujours un message (Etienne quoi). Merci a tous ceux aussi qui ne laissent pas de messages, s'ils existent!
13 mars
Au cours de ce voyage, les grasses matinees etaient comme les spaghettis carbonaras dans nos assiettes : toujours rares, toujours bienvenues. Nous avons donc fait imploser le reveil, avant d'avoir vers midi des petits scrupules. Decision est donc prise de visiter un peu les Sights de Kun Ming, ville de l'Eternel Printemps.
Ce surmom, ville de l'Eternel Printemps, la ville ne l'a pas vole. S'il y fait un peu froid le soir, le jour est d'une douceur et d'une clarte qui font un bien fou apres la grisaille d'Hanoi. Apres quelques combats avec les distributeurs de billets de banque (cf message precedent) et l'incurgitation de delicieuses "nouilles qui traversent le pont", nous decidons d'aller voir le Temple du Bambou. Sauf que non, il est trop tard, dans ce pays de leve-tot, ceux qui osent se bouger a 14h ne meritent aucune pitie. C'est un gentil flic qui, avec ses deux mots d'anglais, nous fait comprendre ce terrible etat de choses, meme si ce qu'il disait ressemblait plus a "no more bus". Decision est prise d'aller voir un autre point touristique, les Monts de l'Ouest.
Monts de l'Ouest, un peu a l'Ouest
Bus local, donc. Comme toute grande ville chinoise qui se respecte, il y a des teles meme dans le bus, qui diffusent des contenus un peu abrutissants, surtout quand on ne parle pas chinois. Nous arrivons en vue de grandes collines, tendance montagnes abruptes. Des moines taoistes un peu fous y ont construit un reseau de temples, parfois au bord de falaises abruptes, voire carrement en y creusant des galeries.
Nous nous attendons sacrement a un trip mystique, genre ascenscion d'une montagne vicieuse, sur un chemin malaise, a croiser quelques infatigables randonneurs, jusqu'a arriver a un petit monastere perdu dans les hauteurs.
Tu parles, Charles ! A l'arrivee du bus local, il y a des bus et minibus qui peuvent vous epargner les trois-quarts de montee. Nous decidons de faire nos guerriers francais, et de marcher un coup. Sage decision car la nature est belle, et on trouve quelques petits temples sympathique perdus dans les arbres. Mais ne vous imaginez pas que c'est soudain devenu authentique. Nous marchons sur la route en bitume, et croisons tous les dix metres un gigantesque plan nous indiquant : ou nous sommes, ou nous allons, combien de temps nous reste-t-il a marcher, etc. Tres pratique, par ailleurs, meme si question experience authentique on repassera. Le seul chemin qui sortira de la route pour s'enfoncer dans la foret est integralement pave de pierres, quasiment une autoroute.
Avec effarement et surprise, nous decouvrons le tourisme a la chinoise, qui nous poursuivra pendant tout notre sejour dans l'Empire du Milieu : tout refaire, tout planifier, tout simplifier, pour permettre aux hordes de se retrouver, et surtout de trouver le chemin jusqu'aux boutiques. Des avantages certains (simplicite des transports, simplicite d'orientation, messages en anglais), et des inconvenients tout aussi certains (ambiance Disney un peu partout, foules compactes dans tous les sites, impossibilite de sentir autre chose derriere la fabrique et le lustre). Nous en reparlerons en detail, pour l'instant ce n'etait qu'une premiere approche.
Toujours est-il que malgre l'ambiance un peu aseptisee, la balade est ravissante.
Nous arrivons apres une bonne marche au point ou les minibus laissent les touristes chinois. Pour continuer l'ascension jusqu'aux temples accroches a la montagne, il est encore possible soit de prendre un telesiege (la marotte des Chinois des qu'il s'agit de s'epargner une marche), soit un petit train sur roues pour arriver au pied des temples.
Nous avons tellement marche qu'il se fait tard : le telesiege est deja ferme, et nous avons peur de voir portes closes pour les temples. Nous nous decidons pour l'incroyable petit train sur pneus. C'est d'autant plus drole que nous sommes les seuls passagers de ce long train qui aurait encore l'air un peu gamin dans un Parc Walibi. Le voyage en train nous epargne un trajet a pied qui n'aurait ete que visite de magasins de souvenirs un peu idiots, magasins qui jonchent litteralement tout le chemin jusqu'aux temples.
Notre minitrain, vous observerez l'effet pour donner une impression de vitesse
Une ethnie un poil bruyante
Arrives en haut, nous visitons donc ces temples. On dirait qu'ils ont ete construits par des singes, et encore des singes avec du bon materiel d'escalade, alors qu'ils ont ete poses la par des moines sans equipements, il y a des centaines d'annees. Pourquoi donc ? Aucune idee, la vue etait belle, peut-etre... Autour de nous, une foule de touristes chinois. Vous pensiez que le pire du pire c'est la visite d'un site en meme temps qu'un tour organise bruyant ? Ah ah! Nous avons immediatement eu affaire aux gens les plus bruyants de l'humanite : avertis par des glappissements furieux, nous tournons la tete pour apercevoir un groupe de 12 femmes, la quarantaine, au visage et aux habits tres differents des Chinois classiques - probablement une ethnie.
Chacune de ces femmes deploie la puissance accoustique d'un Boeing crissant sur une assiette. Elles s'apostrophent, se separent, se cherchent a grands cris, se retrouvent en hurlant, mais surtout poussent une variete de cris de ravissement a donner mal a la tete a un chanteur de metal. Nous tentons de leur echapper en allant plus vite qu'elles au temple suivant (il y en a une douzaine de petits, eparpilles dans la montagne), mais c'est impossible : non seulement elles sont partout a la fois, mais elles courent litteralement de site en site. Elles arrivent, appellent leurs amies, pousse un cri que j'assimile a un cri d'horreur mais qui doit plutot evoquer l'admiration, puis repartent immediatement parsemer une montagne tres abrupte de sons assez stridents pour provoquer un eboulement massif. Nous craignons pour notre vie.
Nous finissons par trouver la solution toute simple : supporter une minute les cris de cette ethnie des "Tym-pangs Bri-zes", le temps qu'elle nous depasse. Une fois le tumulte passe, et nos oreilles sifflant encore, nous commenceons a apprecier la serenite du lieu. Mais deja, la moitie des temples ferme ses portes, et il faut se depecher.
La vue un poil escarpee depuis les Monts de l'OuestNous croisons un groupe de Chinois avec guide bruyant : "encore", pensons-nous. Cinq tetes chinoises nous observent. Aglae, oppressee, s'exclame "on y va, Charly ?". L'un d'eux se contrexclame dans la langue de Moliere :
- Ah vous etes Francais ? - Ah, euh, vous aussi ?- Oui, de la Reunion !- Et moi de Paris ! ajoute un autre
. Il a fallu faire tout ce chemin pour se rencontrer ah ah!On appelle ca la mondialisation...
La fin de la visite est sensationnelle. Comment ont-ils pu se mettre la ?
Nous redescendons rapidement car il se fait tard, et nous commencons a nous demander comment nous serons a l'heure pour le RDV chez Silvia (avec qui nous avons promis de diner). Le probleme, c'est qu'il est evident que se refaire la descente a pied en entier est impensable, car c'est vraiment long. Tout un tas de vehicules s'arretent devant nous, appates par la possibilite de ramener des Occidentaux aux poches forcement debordants de yuans.
Le probleme, c'est qu'il est absolument impossible de leur faire comprendre qu'on veut descendre la montagne. Mais alors vraiment impossible. Et pourtant, ils ont des cartes de KunMing, qu'ils sortent, qu'ils nous montrent. Nous designons notre chez-nous, ou pas loin, les types demandent "zai nali, zai nali ?" (ou ? ou?), nous leur designons a nouveau, les types recommencent. C'est particulierement penible, jusqu'a la delivrance.
I want to help you, Mao said
Au joli son flute d'un "Can I Help you?" nous tournons nos deux tetes vers une minuscule adolescente a lunettes. Elle est a la tete d'un groupe de jeunes, tous ont l'air plutot marrants, aucun ne parle anglais, a part elle. Apres avoir brievement explique notre dilemme, elle nous demande de la suivre : eux aussi se rendent a KunMing, il suffit de les suivre, ils nous ameneront a bon port.
Une seconde apres, nous nous retrouvons a observer le groupe negocier avec une conductrice de mini-bus. Nous ne comprenons pas ce qu'il se passe, encore moins combien cela va couter, mais c'est plaisant a observer. Le mini-bus nous amene a l'endroit ou le bus local nous avait depose. Parfait !
Notre dictateur benevole"Ah, merci, c'est gentil, maintenant nous savons ou nous sommes ! Nous pouvons nous debrouiller tous seuls, dorenavant !"
Cette phrase, nous essayons de la formuler sous mille et une facons. Impossible. La jeune fille, dont j'ai deja oublie le nom fort chinois, a DECIDE de nous aider. Cela veut dire, une fois traduit du chinois, qu'il n'y aucune maniere de transiger, de passer outre, de s'en sortir. Mais c'est pas grave, non ? me demanderez-vous, un peu exasperes par notre mauvaise grace. Non, sauf que... la miss n'a pas du tout compris ou nous voulions aller. Nous lui avons signifie que nous voulions rejoindre notre amie, qui travaillait a la Yunnan University, mais elle a compris que nous voulions aller a la Yunnan University. Et une fois qu'elle a decide de comprendre ca, impossible de lui faire comprendre autre chose.
Nous essayons en douce de lui montrer sur un plan que habitons a une demi-heure de marche de la Yunnan University, rien n'y fait. Nous voila embarques dans une succession de bus locaux, dont nous savons pertinemment qu'ils ne vont pas la ou nous souhaitons nous rendre. Pendant ce temps, la nuit tombe, et tutti quanti. Quand nous descendons enfin de notre panoplie de bus, notre dictatrice nous embarque de force dans une rue : elle a decide de nous accompagner a pied jusqu'a la residence des internes de l'Universite (qu'importe que nous n'en ayons jamais parle). Longue marche, dans le froid pour elle, car elle est short et debardeur. Elle nous offre un porte-bonheur un peu pourri, mais c'est touchant, puis nous laisse devant le dortoir des Universitaires.
Pour ne pas la vexer, nous faisons comme si nous etions ravis qu'elle nous ramene la. Aglae m'emmene de force dans les batiments, pour faire semblant d'y rentrer. C'est absurde. Nous attendons un moment, puis sortons en courant. Il faut rejoindre la rue sans se faire reperer par notre gentille bienfaitrice, qui mourrait de honte si elle nous voyait aller ailleurs que la ou elle nous a deposes. Nous la voyons au loin, attendant un bus ; horreur ! Aglae me fait plonger du nez derriere une affiche. Elle ne nous a pas vus, sauves!
Nous courons rentrer chez "nous", desoles qu'il soit deja si tard. Nous retrouvons une Silvia morte de faim dans son propre appartement. Comme il faut nous preparer pour la soiree (un concert apres un diner), elle part diner avec son boy, et nous la rejoindrons un peu plus tard. Je saisis l'occasion, non pas pour me faire beau (peine perdue), mais pour faire une sieste. A mon reveil, Aglae est encore plus belle que jamais, et moi plus endormi que toujours.
Concert etonnant
Le diner puis la soiree nous permettent d'apprecier encore plus, s'il etait possible, la compagnie de Silvia, et d'approfondir notre connaissance de ce groupe d'expats de Kun Ming. Partout ailleurs les expats que nous avions pu observer faisaient des groupes compacts, un peu snobs, qui n'avaient pas forcement envie de se meler a la population locale, et qui gravitaient dans des espaces un peu glamour un peu chic.
Ici, entre le diner et le concert live de rock n'roll old style donne par des Canadiens et un vieillard hippie, l'ambiance ressemble plus a une auberge de jeunesse geante : tout le monde a l'air etudiant, sympa, ouvert, parle chinois, ramene des Chinois aux soirees, tout le monde se connait. C'est un monde d'expats a echelle humaine, extremement doux, parce que majoritairement habite par des jeunes, et par des gens qui aiment la Chine. Rien a voir avec l'expatrie venu ici pour faire du business avant tout.
Nous sirotons quantite de bieres, Silvia est absolument dechainee - en gros elle danse tout le temps, et pousse de grands cris a chaque fois qu'elle reconnait quelqu'un, soit toutes les minutes - et on nous presente beaucoup, BEAUCOUP de monde. La fatigue attaque Aglae avec fougue, et voir un vieux monsieur danser et chanter ne semble pas lui inspirer autant de folie que prevu.

Je ne suis pas plus en forme, et nous finissons par rentrer plus tot que Silvia qui, nous l'apprendrons le lendemain, passera la nuit a danser. Elle nous ecrit l'adresse de chez elle en chinois, sans quoi il est impossible d'expliquer au taxi comment rentrer (quel monde impitoyable), et nous voila extraits de la folie du coin.
Vous auriez du louer Gengis pour votre voyage en Chine, l'homme qui savait parler aux oreilles des chinoises.
RépondreSupprimeret bien mon cher fils je t'ai connu beaucoup beaucoup + directif....Le périple metromarcopolo t'a changé en tout mou tout docile prêt à succomber à la 1° dictatrice d'1,50m ? Pétard.
RépondreSupprimerquel ravissement pour les yeux de voir des petites photos de vous :)
RépondreSupprimerj espere que vous allez bien et vous fais pleins de bisous :)