jeudi 19 mars 2009

Reconstruction (Hanoi)

Pour ceux qui a tout hasard s'etonneraient du relatif silence de ces derniers jours, surprenant par rapport a l'abondance de messages de ces derniers temps, la raison est simple : a Hanoi, nous avons eu beaucoup de temps sur internet pour rattraper le blog, mais depuis notre arrivee en Chine nous enchainons les transports et les visites, sans un moment pour se connecter. J'ose esperer que la situation va s'ameliorer, au plus grand bonheur des milliers de fans qui nous lisent chaque jour.



4 mars - Suite de l'episode precedent
Pleurs, bien entendu. Rage, on s'en douterait. Impuissance, certainement. Deux semaines plus tard, je revois encore avec acuite ce moment ou, au milieu de ce petit parc qui jouxte l'ambassade, je tente vainement de calmer Aglae, n'etant pas moi-meme beaucoup plus zen.


Il s'agit de reflechir, d'etudier toutes les options. Facile a dire. Une chose a la fois, comme je dis toujours : nous rentrons d'abord vers l'hotel ou nous avons pose nos bagages. En entrant, ce n'est plus le vieillard endormi entrapercu a l'aube qui nous accueille, mais une charmante jeune femme. Pour les amateur des films Chungking Express ou 2046 de WKW, c'est sans doute possible le sosie de Faye Wong : cheveux courts, style vestimentaire original et tres juste. Ele est tres souriante et parle un bon anglais sans beaucoup d'accent.


En apercevant la tete d'Aglae, elle sent que quelque chose ne va pas. Elle nous propose une chambre disponible, une chambre pour 3 personnes, avec un petit rabais, plutot que d'attendre encore une heure qu'une chambre se libere. Le coeur lourd, je lui explique brievement le pourquoi du comment de notre etat.


- Oh it's not a problem, we can have the visa for you. Tell your friend that she doesn't have to worry at all. Tell her, don't worry. We will have the visa, sure.


Je suis un peu surpris : pourquoi eux m'obtiendraient un visa interdit par les autorites chinoises au Vietnam ? Je remets la question a plus tard, et accepte la chambre d'abord. Nous nous dechargeons de nos sacs, nous asseyons un moment, et commencons a reflechir a nos plans :


- verifier les derniers echos sur les forums de routards sur internet (ca ne donnera rien de nouveau : en decembre dernier on pouvait obtenir un visa a Hanoi)

- donner sa chance a notre pension-agence de voyage, mais d'abord verifier si les autres "agences de voyage" plus connues nous disent pouvoir faire ca elles aussi

- envisager tous les plans B possibles : aller a Hong-Kong demander un visa, retourner a Singapour demander un visa,

- envisager les plans C, D, E, etc : si pas de visa a HK, aller a Taiwan pour voir la Chine, ou directement au Japon, et sinon, aller prendre le Transsiberien non plus a Pekin mais a Vladivostok, en prenant un bateau ; si pas de visa a Singapour, visiter la Malaisie, l'Indonesie, aller voir mon frere en Australie, que sais-je ?



Bref, mille options possibles, transcrites le soir-meme sur une feuille de brouillon incomprehensible au commun des mortels. Rapidement, nous nous rendons compte que nous sommes toujours aussi perdus, mais que nous avons mille directions. Toutes, bien entendu, nous couteront beaucoup plus cher que prevu, puisqu'elles sont a base d'avions pris au dernier moment.


Visite en solitaire de Hanoi
Notre belle equipe se separe en deux groupes, chacun constitue de 1 chef d'equipe et de zero equipiers : Aglae a pour mission de consulter les forums, d'obtenir des prix precis sur les billets d'avions, et surtout d'ecrire a ses contacts a Singapour et Hong-Kong afin de savoir si les visas chinois peuvent etre obtenus sur place, ou si ca va encore etre la meme galere.


Quant a moi, je dois aller faire le tour des agences de voyage celebres de la vieille ville, afin de tester si ce que propose notre guest-house est courant et possible. Je me lance dans ces rues boueuses et tristes sous le ciel gris. Hanoi, passe l'aube, est remarquablement animee : presque autant de motos qu'a Saigon, et surtout une accumulation de boutiques, d'artisans et de bruits qui fait presque peur.


Je me rends vite compte que ma tache est assez absurde : des "agences de voyage", il y en a absolument partout. Dans certaines rues, une boutique sur deux est une travel agency : toutes proposent des bus, des excursions dans la baie d'Halong, des billets d'avions, des visa services pour la Chine ou le Laos. Je ne peux decemment pas demander a toutes, d'autant que la plupart sont plutot louches.


Louches ? Pour donner un exemple, il faut savoir qu'une agence nomme Sinh Cafe a lance depuis une bonne dizaine d'annees maintenant un service de bus Open Tour, pas tres cher, qui permet de sillonner le pays, en descendant et en montant quand on veut dans les bus Sinh Cafe. D'autres cafes ont lance leurs propres Open Tour, mais surtout une immense quantite d'agences de voyages a decide d'attirer facilement des voyageurs... en s'appelant tout simplement "Sinh Cafe Travel Agency". En une demi-heure, je croise donc 16 faux Sinh Cafe, dont tous ont un logo officiel photocopie sur leur devanture. L'un d'eux vend meme des bijoux...


Un peu deborde par ce fourmillement d'agences, j'en essaie deux ou trois "vraies". Toutes me disent la meme chose : "oui nous pouvons vous obtenir un visa chinois. Ah l'ambassade vous a dit non ? ah ben nous ne pouvons rien faire".

Un (vrai) drame
Dans le veritable Sinh Cafe, je fais la connaissance deux femmes etonnantes. La premiere, la cinquantaine, est une Marseillaise de bagout, qui a fait la rencontre de la seconde, une francophone d'origine Thai, mariee a un Francais. Toutes deux ont la cinquantaine. Elles ne se connaissaient pas, mais se sont rapprochees a l'occasion d'une balade dans la baie d'Ha Long, au cours de laquelle le mari de la Thai (veritable francais, lui) a subi une violente attaque cardiaque.

La Marseillaise, le coeur gros, me raconte tout d'un coup, sans que je lui aie specialement demande quoi que ce soit. Le rapatriement sur une ile de la baie, le transfert par helicoptere vers l'hopital francais de Hanoi, l'annonce de la mort clinique du mari, l'hesitation a le debrancher au plus vite, les formalites compliquees d'assurance, les complications pour aller disperser ses cendres en Thailande, comme il l'avait souhaite... Bref, toute une serie d'horreur qui me fait realiser soudainement a quel point cette histoire de visa est derisoire. L'air perdu de la Thaie, un peu souriante, mais completement larguee, me restera longtemps en memoire.

Entre leurs mains

Nous decidons finalement de confier nos passeports a notre hotel. Les refus des autres agences, au lieu de me faire manquer de confiance envers les gens de notre hotel (ils sont fous, ils ont trop de confiance en eux), me fait au contraire comprendre que, s'ils sont aussi surs d'eux, c'est qu'il y a un truc. J'essaie de leur demander quel est ce truc, mais la fille a du mal a m'expliquer : visiblement ca passe par une entreprise qui s'occupe de ces trucs de visas, et elle ne sait pas trop ce qui se passe. En gros elle n'en sait rien, mais elle est sure d'elle. Comme nous ne payons qu'a reception du visa, nous n'avons rien a perdre, et nous avons jusqu'a l'expiration de notre visa viet pour prendre un avion en catastrophe et quitter le pays. Nous demandons le service express, le seul qui peut nous sauver (nous sommes jeudi, et le week-end nous enleve deux jours ouvrables).

Toujours aussi epuises par notre demi-nuit et les vexations du matin, Aglae et moi nous ecroulons sur notre lit : nous ne pouvons rien faire de plus. Nous passons toute la fin d'apres-midi a roupiller et a nous faire du souci, reprenons des forces, et decidons de visiter la ville le lendemain. Que pouvons-nous faire d'autre ?

3 commentaires:

  1. Mais quel suspense insoutenable !!

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  2. non pas des milliers (de fans et d'emm...)mais des millions qui vous attendent chaque jour...et nuits.
    bizoux

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  3. Ayant visité hier Tante Jacotte, dont la santé est vacillante mais avec le moral, elle me charge de vous remercier de la carte postale qui l'a profondément émue..Elle vous envoie son bon souvenir, vous embrasse fort et vous souhaite une bonne fin de périple. Evelyne et Ton Phil

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