samedi 27 décembre 2008

Udaipur, pas contre

Le trajet en train depuis Delhi etait eprouvant. Absolument eprouvant. Nous croyions que notre classe etait la meme que pour le voyage precedent ou, blattes mises a part, le voyage avait ete plutot confortable, mais il y avait une petite difference, que nous n'avons meme maintenant pas tout a fait comprise.

En gros les banquettes etaient plus petites, moins confortables, aucun drap n'etait fourni, les fenetres fermaient mal et laissaient le froid rentrer, et surtout il n'y avait plus de porte entre les wagons. On etait donc en direct live avec les toilettes.
Autre probleme, une bande de jeunes survoltes a passe la nuit a chanter des chansons populaires indiennes. Mignon, non ? Oui mais ca a dure quasiment toute la nuit, et les rires, et les cris. Encore plus de vendeurs hurlant "qui veut mon the ?" a chaque arret dans une station, meme en pleine nuit, ont fait que notre nuit ressemblait aux pointilles du papier toilettes qui commencait a s'amenuiser au fur et a mesure que la tourista, qui nous avait jusqu'ici miraculeusement echappe, commencait a nous gagner.

Emmitoufles dans nos sacs de couchage, nous avons tellement dormi comme des zombies que c'est uniquement en arrivant dans la gare d'Udaipur, 14 heures apres notre depart, que nous avons compris que nous etions arrives. Si ca n'avait ete le terminus, nous aurions ete bons pour reprendre un train dans le sens inverse a la prochaine station.

Il etait 9 heures du matin, nous etions detruits, la fievre me terrassait, Aglae toussait de plus belle, nous avions faim et froid, mais, ENFIN, nous etions au fond du Rajahstan, le pays des Touristes, si connu et si emprunte par les tours operateurs !

Enfin bon, nous avons quand meme miserablement echoue dans notre chambre d'hotel. A peine le temps de remarquer que celle-ci, fort charmante et peinturluree de motifs floraux assez sympa, etait sise dans une vieille haweli, cour arabisante du coin, aux murs blancs et aux portes aux formes orientales, et paf, nous sombrons dans le sommeil le plus morbide. A notre reveil, ma temperature gagne les 38 degres et repart avec un prix, a savoir deux nouvelles heures de sommeil.

Remonter la pente, et la descendre jusqu'au lac

Apres l'ingestion d'environ 15 grammes de paracetamol, je gravis, derriere Aglae, les marches jusqu'au toit de l'hotel, decidement charmant. Et la c'est le choc : un immense lac s'etire autour d'une vieille ville coloree. Autour de ce lac, d'immenses palais de Maharadjahs, des villas de riches bourgeois de ces temps-la pavoisent les unes a cote des autres, aujourd'hui toutes transformees en roof tops restaurants. Et au milieu de ce lac, comme deux taches d'encre blanche sur une feuille bleue, deux iles transformees en palais rajpuths des milles et une nuits, Lake Palace et Jasmandir.

Pour ceux qui ont vu Octopussy, ils auront vu James Bond s'y promener. Pour les autres, comme vous et moi, il vous suffira de savoir que c'etait epoustouflant. Ca nous a donne la force de nous requinquer, de boire et manger, et de partir dans la ville pour ce soir et le lendemain. Le soleil, qui n'etait pas de la partie le jour de notre arrivee, s'est manifeste le lendemain, au fur et a mesure que notre sante s'ameliorait (mais pas la tourista, bien entendu). Nous avons meme fait des tours sur le lac en bateau, et la vieille ville fait souvent penser a Venise. Le palais du Maharadja est gigantesque et magnifique: murs incrustrees de miroirs, vitraux, marbres ciseles et lustres en crital a tout va...

Un peu triste : le Lake Palace ne se visitait pas, puisque c'est un hotel de luxe absolu, ou la chambre vaut 200 dollars la nuit. Nous avons prefere nous en passer et payer 30 fois moins pour notre charmante petite maison d'hote.

Kingstown India

Ce qui nous a fait bien marrer, sinon, c'etait peut-etre le resto ou on est alles deux fois. Rien que le nom, hein : le Cool Restaurant. On y est alle par hasard, parce qu'on avait faim, et que c'etait le seul machin ouvert. Et la on decouvre l'ambiance la plus bizarroide du monde : sous un deluge de Bob Marley, deux belles et tres jeunes Occidentales affalees sur des coussins, par terre, entourees d'une horde de jeunes Indiens bien coiffes qui les draguaient a mort - quand je dis a mort, c'est-a-dire qu'il y avait toujours trois personnes en train de leur parler, et que parmi ces trois personnes, deux au moins etaient les serveurs dont nous essayions en vain d'attirer l'attention.

Tout le monde etait cooooool, gentil, les plats arrivaient mais de facon coooooooooooool (lente, quoi), comme toujours en Inde, on essayait de nous parler en francais etc. Le premier soir, nous avons laisse ces filles seules en partant, et ils avaient l'air de fermer derriere nous : j'etais rassure de les revoir le lendemain, visiblement aucune tournante n'avait eu lieu (ou bien elles en redemandaient). Mais le lendemain il y avait aussi une belle armee de roots, longue barbe, habits soigneusement salis, vetements indo-cools et regards broussailleux en prime.

Babas, les rois des elephants

Les babas-cool en Inde, les troubadours comme les appelle Clara, qui nous a rejoint quelques jours plus tard, c'est toute une histoire. Je vous promets c'est delirant. Au choix, vous avez les femmes qui ont coche la case "experience mystique" dans leur agence de voyage, et qui se promenent, le visage peinturlure de facon ridicule (chez les hindous, ca passe mieux quand meme), qui portent des saris de mariage toute la journee, joignent les mains pour dire namaste a des gens du coin en jean et T-shirt qui rigolent doucement.

Mais les meilleurs sont les authentiques babas comme ceux du Cool Restaurant. Il y a ceux qui sont restes coinces dans les annees 70, qui ont vieilli, et qui se promenent maintenant avec barbes blanches et os rouilles a travers un pays qui s'est trop developpe ; moins triste, plus drole, il y a ceux qui auraient bien aime y etre, dans les annees 70, et qui se trimballent le joint aux levres, un vieux sac a dos a la main, des fringues a mourir de rire sur le dos, des barbes plus longues que notre trajet en Asie.

Plus grave, je me demande comment ils arrivent, eux qui parlent de paix et de monde sans argent, a s'accomoder de la marchandisation des touristes qui a lieu en Inde : pour 99 pour cent des gens ici, l'Occidental, et encore plus le roots, n'est qu'un porte-monnaie, qui lui apportera de l'argent contre des joints, des sacs a couchage pourris, des verroteries roots, et des habits de babas cools qu'il exhibera fierement a son retour, fier de pouvoir dire "j'ai ramene ca d'Inde", honteux au plus profond de lui de ne pas dire que la-bas, il n'a pas trouve de societe alternative, mais juste un enfer capitaliste, ou il a decouvert qu'il n'etait qu'un Occidental de plus, et que le seul moyen de trouver des gens cool, c'etait de payer.

En fait, souvent je suis triste quand on croise les babas. Ca devait etre cool, il y a trente ans, quoique, les enfants mendiants etaient deja la, non ? Ca les genait pas ?

En tout cas, je le repete, Udaipur, magnifique.

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